Critique Ciné : Joe, l'Amérique des pauvres

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Joe // De David Gordon Green. Avec Nicolas Cage, Tye Sheridan et Adriene Mishler.


Alors qu’il a tendance à enchaîner les navets d’action où il doit à tout prix assouvir sa vengeance, Nicolas Cage (Tokarev) s’est laissé séduire par le western moderne de David Gordon Green (Prince of Texas, Délire Express) pour un voyage au fond d’une Amérique rongée par la pauvreté, l’alcool et une jeunesse coincée entre son envie de s’en sortir et l’impossibilité d’avancer. C’est là que l’on nous présente Joe, un personnage un peu rustre sur les bords mais tendre comme un agneau quand il s’agit de se lier d’amitié avec un jeune garçon qu’il va peu à peu considérer comme un fils. David Gordon Green n’a pas de pitié et met en scène la pauvreté de cette petite ville du Texas sans aucune pincette. Il nous présente donc des visages tristes, mornes, alcooliques et amochés par la vie. Une vie pas facile durant laquelle ils vont passer leur temps à amocher des arbres afin d’en planter de nouveaux. C’est un boulot physique qu’on nous annonce. Ils ont bien raison. D’un scénario de Gary Hawkins (The Rought South of Larry Brown), Joe cherche donc avant tout à nous plonger dans une atmosphère assez sombre et il le fait avec énormément de simplicité.

Dans une petite ville du Texas, l’ex-taulard Joe Ransom essaie d’oublier son passé en ayant la vie de monsieur tout-le-monde : le jour, il travaille pour une société d’abattage de bois. La nuit, il boit. Mais le jour où Gary, un gamin de 15 ans arrive en ville, cherchant désespérément un travail pour faire vivre sa famille, Joe voit là l’occasion d’expier ses péchés et de devenir, pour une fois dans sa vie, important pour quelqu’un. Cherchant la rédemption, il va prendre Gary sous son aile…

Ce qui est déconcertant là dedans, dans ce petit film à quatre millions de dollars, c’est qu’il dépeint quelque chose que l’on ne pourrait jamais croire voir dans un pays aussi évolué que les Etats-Unis. C’est bien la preuve que l’on nous cache la misère et qu’elle n’est jamais bien loin. Dans le genre on avait pu voir l’an dernier Mud avec Matthew McConaughey. Ce dernier n’était pas mauvais du tout mais je crois que j’ai largement préféré Joe, plus efficace, plus dur. On ne nous donne jamais l’impression que les personnages vont un jour pouvoir s’en sortir. C’est remarquable. Il faut dire que Gary Hawkins, le scénariste, avait l’aide du roman de Larry Brown pour installer son histoire mais peu importe, tout s’accorde à merveille. Au milieu il y a Nicolas Cage. Ce dernier est méconnaissance, livrant l’une des plus belles performances de sa carrière depuis… (on ne compte plus les navets) cinq ans et plus particulièrement le brillant Bad Lieutenant de Werner Herzog. L’acteur est ici au sommet de art, nous incarnant un personnage à la fois authentique et fort qui n’a jamais vraiment réussi à s’en sortir : enchainant les relations avec les prostituées, les whisky coca à longueur de journée et les cigarettes).

Joe est donc un personnage qui collectionne des addictions qu’il n’arrive malheureusement pas à combattre et l’acteur ajoute une certaine nuance là dedans qui est remarquable. La mise en scène de David Gordon Green, recyclé aux films se déroulant au Texas (son précédent film, Prince of Texas, se déroulait déjà dans une bourgade de cette région des Etats-Unis). On peut aussi saluer la prestation du jeune Tye Sheridan (déjà vu dans… Mud) aussi fraiche qu’inattendue. Les actes aussi imprévisibles qu’incontrôlables des personnages de ce film rendent le tout assez surprenant. J’ai toujours été fasciné par cette Amérique profonde et pauvre. On a déjà pu voir ces des dizaines de fois ces dernières années au cinéma mais ce film apporte clairement sa pierre à l’édifice en n’allant pas là où tout le monde aurait pu l’attendre. J’ai tardé à aller voir Joe, je ne sais trop pourquoi, surtout que j’aime beaucoup Nicolas Cage, capable de se prendre au sérieux dans des navets monstrueux sans cabotiner, et pourtant j’ai réellement bien fait de prendre du temps pour aller le voir car c’est un choc et une très belle surprise.

Note : 8.5/10. En bref, l’Amérique profonde du Texas, déprimée et rongée par la pauvreté. Au milieu un Nicolas Cage brillant et touchant.

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