18 Septembre 2024
La première saison de Sherwood, diffusée sur la BBC, avait su capter l’attention des téléspectateurs grâce à une intrigue mêlant drame social et enquête policière dans un décor rural chargé d’histoire. Inspirée de faits réels, elle abordait la fracture sociale encore présente dans une communauté marquée par les conflits de la grève des mineurs des années 80. Ce fut un succès critique et public, offrant un portrait sombre mais poignant d'une société laissée en marge. Malheureusement, la saison 2 n’a pas su maintenir la même intensité émotionnelle ni la même fraîcheur narrative. Bien que quelques ajouts dans le casting apportent de la profondeur, l’intrigue globale souffre de plusieurs défauts, principalement liés à un trop grand penchant pour la politique contemporaine et une transformation de l’intrigue en un thriller plus convenu. L’un des aspects les plus intéressants de la première saison de Sherwood était son ancrage dans le contexte sociopolitique de Nottinghamshire, une région encore marquée par les cicatrices de la désindustrialisation et des luttes de pouvoir économiques.
La série proposait une réflexion subtile sur la désillusion d’une classe ouvrière abandonnée, tout en s’intégrant dans un thriller palpitant. La saison 2, quant à elle, tente de poursuivre dans cette veine, mais s’éloigne rapidement de cette approche nuancée pour se concentrer davantage sur des conflits de clans criminels, abandonnant une grande partie de la profondeur qui avait fait la force de la première saison. L’une des critiques majeures que l’on pourrait faire à cette deuxième saison est son traitement maladroit de la politique contemporaine. Le retour à l’ouverture potentielle d’une mine dans la région de Nottinghamshire, bien que pertinent dans le contexte de la série, est noyé sous des dialogues peu convaincants et une représentation caricaturale des enjeux économiques et sociaux. L’introduction du personnage de Lisa, une shérif moderne, queer, et féminine, semblait prometteuse en tant que figure de rupture avec les codes traditionnels. Pourtant, ses répliques souvent maladroites et sa confrontation avec le tycoon Franklin Warner ne parviennent pas à donner de la substance à cette dynamique.
Au lieu de proposer une réflexion profonde sur les défis économiques de la région, la série se contente de poser des questions sans réellement y répondre. Le problème n'est pas tant l'inclusion d'une critique politique, mais plutôt la manière dont celle-ci est maladroitement greffée sur l'intrigue principale. Les tentatives d'aborder des sujets complexes comme le déclin de l’industrie ou les effets de la "remontée des régions" semblent forcées et ne trouvent pas de réelle résonance dans l’histoire. Là où la première saison brillait par son originalité, en mêlant habilement drame social et thriller, la saison 2 opte pour une intrigue plus conventionnelle, centrée sur un conflit entre familles criminelles. Ce choix d'orientation transforme ce qui était une série avec une profondeur sociologique en un simple affrontement de clans rappelant des œuvres de genre déjà bien explorées. Certes, les tensions entre les Sparrows, les Bransons, et les Warners apportent des moments de suspense intense, mais cet aspect semble parfois trop appuyé, comme si la série voulait compenser ses faiblesses par des scènes d’action et de violence.
L’arrivée des personnages d’Ann et Roy Branson, joués par Monica Dolan et Stephen Dillane, apporte une nouvelle dimension à l’intrigue, mais celle-ci finit par dominer tout le reste. Leur quête de vengeance, après la mort de leur fils, devient l’élément central de la saison. Bien que les performances des acteurs soient indéniablement remarquables, cette focalisation sur le conflit de familles détourne l’attention des thèmes sociaux plus vastes que la série abordait si bien dans sa première saison. L’un des grands atouts de la première saison résidait dans la richesse des personnages, chacun apportant une complexité et des motivations propres, reflétant les divisions et les douleurs d’une communauté meurtrie. Malheureusement, cette richesse est moins présente dans la saison 2. Certains personnages phares, comme Julie (Lesley Manville) ou le détective St Clair (David Morrissey), sont sous-utilisés, au profit des nouveaux venus, pourtant parfois plus caricaturaux. Cette dilution de l’attention sur un trop grand nombre de personnages nuit à la cohésion de l’ensemble, rendant difficile pour le spectateur de s’attacher pleinement à une intrigue particulière.
Si la deuxième saison de Sherwood déçoit par son manque de cohérence narrative, elle est toutefois sauvée par des performances d’acteurs exceptionnelles. Monica Dolan, dans le rôle d’Ann Branson, est tout simplement formidable, incarnant une mère en quête de justice avec une intensité rare. Stephen Dillane, quant à lui, apporte une touche sombre et menaçante à son personnage de Roy, un homme prêt à tout pour obtenir vengeance. Les nouveaux venus comme David Harewood et Oliver Huntingdon se démarquent également par leur talent, ajoutant un dynamisme nécessaire à une intrigue parfois prévisible. En définitive, la saison 2 de Sherwood laisse un goût mitigé. Bien qu’elle conserve certains des éléments qui avaient fait le succès de la première saison, notamment une ambiance pesante et des performances d’acteurs de haut vol, elle échoue à renouveler sa formule de manière convaincante. La série semble avoir perdu de vue son cœur narratif, en se concentrant trop sur des intrigues secondaires et des confrontations familiales au détriment de la réflexion sociale qui la rendait unique.
Le sentiment final est celui d’une saison qui n’était peut-être pas nécessaire, et qui peine à retrouver l’équilibre subtil entre drame social et polar, si brillamment exécuté lors de la première saison. Sherwood demeure une série de qualité, mais cette deuxième saison montre que toutes les bonnes histoires n’ont pas forcément besoin d’être prolongées.
Note : 5/10. En bref, un retour moins percutant qui n’arrive pas à justifier son existence. Reste le casting, impeccable.
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