16 Octobre 2024
La mini-série Nightsleeper, composée de six épisodes, nous propose un voyage qui aurait dû s'annoncer palpitant. Un train à grande vitesse déraillant à cause d'une cyber-attaque mystérieuse, une intrigue qui mêle des personnages stéréotypés, des courses contre la montre et des dialogues à la limite de l'absurde. Le potentiel est là, mais en fin de compte, Nightsleeper n’atteint pas ses promesses. Pourtant, malgré ses nombreux défauts, cette série a un pouvoir d'attraction indéniable qui en fait une expérience à part entière. Le postulat de départ de Nightsleeper est simple et efficace. Un train reliant Glasgow à Londres se retrouve sous le contrôle de mystérieux hackers. Joe (incarné par Joe Cole), un ancien policier en disgrâce, se retrouve embarqué malgré lui dans une mission improbable pour sauver les passagers. Le tout est orchestré à distance par Abigail (Alexandra Roach), une experte en cybersécurité basée à Londres.
Si l'idée de base semble intrigante et promet un thriller haletant, l'exécution laisse rapidement à désirer. Le mot « hackjacked », inventé dans le scénario pour désigner ce type de détournement, semble être la seule idée novatrice autour de laquelle s'articule toute l'intrigue. À partir de là, tout se déroule comme un enchaînement de clichés vus et revus dans le genre des thrillers d'action : un héros solitaire, une menace invisible, et des personnages secondaires qui peinent à susciter de l'empathie. Un des principaux problèmes de la série réside dans ses personnages. On a le droit à toute une panoplie de figures stéréotypées, de l’homme bourru mais attachant au jeune héros mystérieux. Joe, le personnage central, est particulièrement décevant. Joué par Joe Cole, connu pour son rôle dans Peaky Blinders, il semble dénué d’émotions tout au long des six épisodes. Cela crée un décalage étrange avec la tension supposée de l’intrigue.
Il manque de profondeur, et malgré ses tentatives de sauver le monde, on peine à réellement s’attacher à lui. Les autres passagers du train ne sont guère plus mémorables. Ils semblent tout droit sortis d’un catalogue de stéréotypes. L’ancien conducteur de train âgé, sa fille protectrice, un rigger musclé, une journaliste agaçante et, bien sûr, un transport secretary en disgrâce. Ces personnages auraient pu apporter des nuances intéressantes à l’intrigue, mais ils se contentent de réagir de façon prévisible à la crise qui les entoure. On peut noter quelques moments où Nightsleeper semble vouloir changer de direction et explorer des pistes plus originales. On pense notamment à une brève allusion à un style Agatha Christie, où chaque passager aurait pu devenir un suspect potentiel dans une intrigue plus psychologique. Malheureusement, la série revient rapidement à son schéma initial, manquant ainsi une occasion de se démarquer.
Nightsleeper tente de maintenir le spectateur en haleine avec ses nombreux moments de suspense, mais la répétition des mêmes ficelles scénaristiques finit par lasser. Les dialogues sont souvent risibles, et certaines scènes d’action manquent cruellement de réalisme. Par exemple, le fait que tout le monde sur le train semble découvrir une bombe potentielle avec des expressions de surprise forcée frise l’absurde. Le niveau d’incohérence de l’intrigue dépasse même celui que l’on pourrait tolérer dans un thriller d’action. Par exemple, pourquoi personne ne songe à frapper à la porte de la cabine du conducteur lorsque les communications sont coupées ? Pourquoi un groupe de hackers réussit-il à prendre le contrôle d’un train avec une telle facilité alors que la cybersécurité est censée être renforcée ? Ces questions, et bien d'autres, restent sans réponse tout au long des épisodes.
Les moments où la série tente d’insuffler du réalisme sont d’autant plus frustrants qu’ils sont contredits par des décisions scénaristiques invraisemblables. Le fait que l’équipe technique de la cybersécurité prenne les menaces à la légère avant de se rendre compte qu’elles affectent une infrastructure aussi critique que le réseau ferroviaire est un exemple parmi d’autres. Malgré ses nombreux défauts, Nightsleeper réussit à capter l'attention du spectateur. Cela peut sembler paradoxal, mais la série a cette capacité à nous accrocher malgré son absurdité. Les cliffhangers à la fin de chaque épisode fonctionnent parfaitement pour ceux qui aiment enchaîner les épisodes d’une traite. On se retrouve pris dans une sorte de fascination pour un désastre qu’on ne peut s’empêcher de regarder. Cela me rappelle le double téléfilm Atomic Train (1999) avec Rob Lowe. C’était fun et j’aurais justement aimé que Nightsleeper ressemble plus à ça qu’à ce mélange qui ne sait pas toujours ce qu’il veut être entre action, moments dramatiques mal écrits et personnages mal développés.
En d’autres termes, la série est construite pour être consommée rapidement, sans trop réfléchir. Si l’on parvient à mettre de côté les incohérences, le manque de profondeur des personnages et les dialogues maladroits, il y a quelque chose d’indéniablement divertissant dans cette course contre la montre pour éviter une catastrophe ferroviaire. Du point de vue de la réalisation, Nightsleeper ne parvient pas non plus à se distinguer. Les scènes d'action sont souvent filmées de manière conventionnelle, sans réelle créativité visuelle. Les décors, principalement limités à l'intérieur du train, finissent par devenir monotones. Il est regrettable que la série ne fasse pas un meilleur usage de son cadre principal pour créer une atmosphère plus oppressante ou immersive. D’un autre côté, la musique et les effets sonores, bien que discrets, participent à maintenir une certaine tension. Cependant, ils ne parviennent pas à compenser les faiblesses du scénario et de la réalisation.
Nightsleeper emprunte à plusieurs grands classiques du genre, mais sans jamais véritablement atteindre le même niveau. On pense à Bodyguard, pour l’aspect menace terroriste, à Hijack avec son mode de transport détourné, ou encore à 24 avec sa narration en temps réel. Ces comparaisons montrent à quel point la série a du mal à s’affirmer avec sa propre identité. Elle semble vouloir s’inspirer de tout sans jamais offrir quelque chose de nouveau. Le résultat final est une série qui peine à convaincre en tant que thriller et qui manque de la subtilité nécessaire pour devenir un classique du genre. Pour autant, Nightsleeper peut satisfaire ceux qui cherchent un divertissement sans prise de tête, à condition de ne pas être trop regardant sur la logique de l’intrigue. En définitive, Nightsleeper est une mini-série imparfaite, remplie de contradictions. Elle mélange des moments de tension avec des dialogues risibles, des personnages sous-exploités et une intrigue peu crédible.
Pourtant, elle possède un attrait indéniable, probablement dû à son format conçu pour le binge-watching et à sa capacité à maintenir une certaine forme de suspense, aussi absurde soit-il. Si vous êtes à la recherche d'un thriller intense et bien ficelé, Nightsleeper ne sera probablement pas votre tasse de thé. Mais si vous acceptez de suspendre votre incrédulité et de vous laisser porter par une intrigue rocambolesque, vous pourriez bien vous retrouver à avaler les six épisodes d'une traite, même si, en fin de compte, le voyage n'aura peut-être pas été aussi mémorable que prévu.
Note : 4.5/10. En bref, un voyage en train sans retour, entre tension et absurdité.
Disponible sur TF1+
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