9 Octobre 2024
Nightsleeper a su captiver un public en quête de sensations fortes et d’intrigue lors de son lancement sur BBC One. Les deux premiers épisodes de la série plongent les spectateurs dans une aventure haletante, marquée par un mélange de cyber-terrorisme, de conflits politiques et de tensions sociales, tout cela dans le cadre restreint et claustrophobe d’un train en plein mouvement entre Glasgow et Londres. Pourtant, derrière cette façade de thriller à haute intensité, la série tente aussi d'aborder des thèmes plus profonds, ce qui ne manque pas de poser des questions sur la pertinence et l'exécution de ce mélange de genres. Dès les premières minutes du premier épisode, Nightsleeper ne perd pas de temps pour nous plonger dans l'action. Le cadre de la série, un train de nuit filant à toute vitesse entre deux grandes villes britanniques, offre un terrain fertile pour un thriller. Il permet une montée en tension presque automatique, avec ses espaces confinés, ses passagers variés et son rythme implacable.
Lorsque le train de nuit Glasgow-Londres est piraté à l'aide d'un mystérieux dispositif, douze passagers se retrouvent piégés à bord… Alors que le train est hors de contrôle et que toutes les communications ont été coupées, un ancien policier, Joe Roag, finit par prendre contact avec la directrice de la cybersécurité Abby Aysgarth, via un téléphone satellite. Abby et son équipe découvrent bientôt que non seulement le train, mais aussi tout le réseau ferroviaire, ont été piratés, le rendant impossible à contrôler. Joe et Abby, ces deux étrangers uniquement reliés par un téléphone, doivent désormais faire équipe et trouver un moyen d'arrêter ce train et sauver ses passagers…
Le spectateur est pris dans cette course contre la montre dès le départ, lorsque l'officier de police Joe Roag, joué par Joe Cole, se retrouve au cœur d’une prise d'otage orchestrée par un mystérieux hacker qui contrôle le train à distance. Ce qui rend Nightsleeper intrigant au premier abord, c'est cette idée d'un train symbolique de la modernité – un réseau de transport à la fois vital et défaillant dans la réalité quotidienne des Britanniques – devenu un instrument de terreur. Mais là où la série trébuche un peu, c'est dans sa gestion de l'équilibre entre l'intensité dramatique et l'humour. Les dialogues, souvent ponctués de blagues ou de remarques sarcastiques, ont tendance à atténuer la gravité de la situation, rendant parfois difficile de prendre au sérieux la menace qui pèse sur les personnages. C’est d’ailleurs l’un des points qui m’a le plus frustré : comment se sentir véritablement concerné par la sécurité des passagers, comme si la situation était moins dramatique qu’elle ne le paraît ?
L’un des aspects les plus réussis de Nightsleeper est son casting. Joe Cole, dans le rôle de Joe Roag, et Alexandra Roach, qui incarne Abby Aysgarth, agent du National Cyber Security Centre (NCSC), livrent des performances solides, malgré des dialogues parfois maladroits. Leur alchimie à l'écran est d’autant plus remarquable qu’ils n’interagissent que par téléphone pendant une grande partie des deux premiers épisodes. Ils parviennent à rendre leurs personnages attachants et crédibles, même si l’on aurait aimé voir leurs trajectoires respectives mieux explorées. Cependant, le reste du casting souffre d’un manque de profondeur. Les personnages secondaires, bien que variés, semblent souvent stéréotypés : un ministre corrompu, une journaliste inquisitrice, un ancien conducteur de train aigri, un jeune étudiant enflammé. Chacun joue un rôle précis dans cette micro-société piégée à bord du train, mais leurs interactions donnent parfois l’impression d’être là pour servir une morale un peu simpliste : la coopération entre des individus opposés par leurs croyances et leurs expériences est essentielle pour surmonter la crise.
Si le message est pertinent, il est malheureusement livré de manière souvent trop mécanique et prévisible. C'est ici que Nightsleeper pêche le plus : dans sa volonté d'intégrer des commentaires sociaux et politiques, elle devient parfois maladroite et didactique. Les dialogues prennent souvent une tournure explicative, où les personnages énoncent presque littéralement leurs dilemmes et leurs motivations face à des problématiques contemporaines. Que ce soit l'exploration de la polarisation politique, les tensions liées aux classes sociales, ou encore les questions d’égalité, tout est abordé de manière tellement explicite que cela en devient contre-productif. Personnellement, je suis favorable à une télévision qui tente de refléter les réalités sociales et d'encourager la réflexion, mais cela doit être fait avec finesse et subtilité, sans que le spectateur se sente assommé par des leçons de morale. En particulier, certaines scènes m'ont semblé presque forcées, avec des personnages qui débattent de sujets socio-politiques en plein milieu de moments de tension. À titre d'exemple, l'antagonisme entre certains personnages, censé représenter la diversité des points de vue dans la société moderne, semble souvent caricatural.
Cela crée un fossé entre le potentiel de la série à aborder des sujets importants et la manière dont elle les traite à l’écran. Côté intrigue, Nightsleeper n’innove pas particulièrement. On retrouve tous les ingrédients classiques d’un thriller : une situation d'urgence, des personnages aux passés troubles, des rebondissements prévisibles. L’histoire avance à un rythme soutenu, même si elle semble parfois emprunter des chemins déjà vus. On pense notamment à des films comme Die Hard ou Red Eye, qui utilisent également des cadres fermés pour créer du suspense. Cependant, la série réussit à maintenir un certain intérêt grâce à sa narration en temps réel, qui offre une sensation d'urgence authentique. La tension croissante entre les passagers, la découverte progressive des motivations du hacker, et la quête désespérée pour reprendre le contrôle du train, sont autant d’éléments qui captivent le spectateur. Mais encore une fois, l’effet est souvent atténué par des répliques humoristiques qui cassent le rythme dramatique.
En fin de compte, Nightsleeper est une série qui possède un fort potentiel mais qui, à ce stade, peine à trouver son équilibre entre thriller à haute tension et commentaire social. Les deux premiers épisodes posent des bases solides pour une intrigue palpitante, mais les personnages stéréotypés et les tentatives parfois maladroites d'introduire des réflexions sur les divisions sociales affaiblissent l'ensemble. Cela dit, pour les amateurs de suspense, Nightsleeper reste un divertissement à suivre, ne serait-ce que pour découvrir comment cette aventure ferroviaire se terminera. Avec un ajustement dans la tonalité et un développement plus nuancé des thématiques sociales, Nightsleeper pourrait devenir une série mémorable. Pour l’instant, elle laisse l’impression d’un train en route vers une destination encore incertaine.
Note : 5/10. En bref, une aventure ferroviaire qui n’est pas dénuée de potentiel mais qui peine à trouver son équilibre pour le moment.
Diffusée sur TF1 à partir du mercredi 9 octobre 2024, disponible sur TF1+
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