Joan (Mini-series, 6 épisodes) : une histoire d'émancipation féminine

Joan (Mini-series, 6 épisodes) : une histoire d'émancipation féminine

La mini-série Joan (ITV pour les britanniques, The CW pour les américains), a rapidement fait parler d'elle, promettant une reconstitution captivante des années 80, une bande-son iconique et une performance attendue de Sophie Turner dans le rôle principal. Mais, après avoir visionné les six épisodes, mon avis sur cette production est plus nuancé que l'enthousiasme initial que la bande-annonce avait suscité. Joan raconte l'histoire de Joan Hannington, une femme au parcours incroyable qui, après une enfance marquée par les abus et un mariage violent, devient une figure incontournable du crime londonien, spécialisée dans le vol de bijoux. Inspirée de l'autobiographie de Hannington, I Am What I Am, cette série tente de capturer la transformation de Joan d'une femme en difficulté à une criminelle redoutée, surnommée "La Marraine" du crime. Un des points forts de Joan est sans aucun doute sa capacité à recréer l’atmosphère des années 80, une époque marquée par des excès en matière de mode, de musique et de culture. 

 

Dans le Londres des années 1980, Joan Hannington fuit son mariage désastreux avec un homme violent. Aspirant à une vie meilleure pour elle et sa fille Kelly, Joan se transforme, grâce à son intelligence, son charme et son talent pour l'imitation, en voleuse de bijoux hors-pair. Flirtant avec le danger, elle voit son quotidien rythmé par des hauts et des bas...

 

Les costumes, les voitures, les décors, tout est là pour nous ramener à une époque où "la cupidité était de mise". Sophie Turner, qui incarne Joan, arbore des tenues fabuleuses, mêlant fourrures et bijoux clinquants, avec une confiance qui transperce l’écran. Cependant, cette opulence visuelle cache parfois des faiblesses plus profondes dans la narration et la cohérence. L'une des critiques les plus marquantes concerne la bande-son de la série. Si la musique des années 80 devait être l'une des forces de Joan, elle devient rapidement une source de frustration. Le choix des morceaux, parfois anachronique, brouille l'immersion mais colle avec l’esprit des productions de ces dernières années qui aiment ajouter des musiques qui n’ont rien à voir avec l’époque (Les Chroniques de Bridgerton en a fait une sorte de gimmick) dépeinte afin de créer quelque chose. Joan se veut résolument féministe, et à bien des égards, elle y parvient. 

 

La série montre une femme forte, qui prend sa vie en main dans un monde dominé par des hommes souvent violents ou manipulateurs. La relation de Joan avec sa fille, Kelly, est présentée comme la principale motivation derrière ses actes criminels, rendant ses actions, bien que moralement discutables, compréhensibles. Joan est poussée dans le crime par un désir de survie, à la fois pour elle-même et pour sa fille. Cependant, la série tombe dans certains travers. Tous les personnages masculins sont dépeints soit comme des individus faibles, soit comme des êtres profondément mauvais, laissant peu de place à la nuance. On retrouve cette tendance dans de nombreuses séries récentes qui, bien qu'elles cherchent à promouvoir des valeurs féministes, finissent par caricaturer les hommes. Le féminisme de Joan manque parfois de subtilité, et on se demande si une telle simplification était vraiment nécessaire pour faire passer le message. 

 

L'intrigue de Joan suit un schéma bien rodé dans le genre des films de braquage. Dès le début, nous savons que Joan va se retrouver plongée dans des situations dangereuses, avec des moments de tension, de poursuite, et d'ingéniosité criminelle. Et, dans l'ensemble, la série livre une histoire divertissante. Les scènes de braquage sont bien réalisées et la montée en puissance de Joan dans le milieu criminel est intéressante à suivre. Cependant, malgré un démarrage prometteur, Joan devient rapidement plus prévisible qu'innovante. Les rebondissements, bien qu’efficaces, manquent parfois d'originalité. La série semble peiner à sortir des sentiers battus et à offrir des moments vraiment marquants. À mesure que les épisodes avancent, on a l'impression que l'histoire s’essouffle et que le potentiel initial n'est pas pleinement exploité. Sophie Turner, mondialement connue pour son rôle de Sansa Stark dans Game of Thrones, livre une performance solide dans Joan. Elle s'approprie le personnage avec aisance, alternant entre vulnérabilité et détermination. 

 

Son jeu est crédible, et elle parvient à donner de la profondeur à une héroïne complexe, à la fois victime et criminelle. Cependant, malgré sa présence charismatique, Turner ne parvient pas toujours à insuffler l'énergie nécessaire pour rendre le personnage vraiment inoubliable. Peut-être est-ce dû à un scénario qui ne lui permet pas de briller autant qu’on l’espérait. De plus, les personnages secondaires, bien que bien interprétés, sont souvent trop stéréotypés. Que ce soit le mari violent, le patron libidineux ou les complices du monde criminel, ils manquent de nuances. Cela renforce l’impression que Joan s'appuie trop sur des clichés, là où elle aurait pu explorer des dynamiques plus subtiles et complexes. Si Joan est agréable à regarder et remplit son rôle de divertissement, elle souffre d'une écriture parfois inégale. Certaines répliques tombent à plat, et la série peine à maintenir un rythme soutenu sur ses six épisodes. Après un premier épisode accrocheur, les épisodes suivants s'enlisent dans des situations répétitives, et les dialogues manquent parfois de finesse. 

 

Le personnage principal, bien que captivant au début, devient presque trop prévisible dans ses décisions, ce qui diminue la tension narrative. La mise en scène, quant à elle, est soignée, mais manque d’audace. Les scènes de braquage et de poursuite sont bien filmées, mais elles ne se démarquent pas de ce qu'on a déjà vu dans d'autres productions du même genre. La série semble avoir joué la carte de la sécurité, préférant rester dans un registre classique plutôt que d'explorer des approches plus innovantes. En fin de compte, Joan est une mini-série qui offre un divertissement plaisant, notamment pour les amateurs des années 80 et des récits de braquage. Cependant, elle peine à se distinguer réellement dans un paysage télévisuel déjà saturé de séries du même genre. Malgré une interprétation honnête de Sophie Turner et une reconstitution visuelle réussie, la série est alourdie par une écriture inégale et un manque de subtilité dans ses messages.

 

Note : 5.5/10. En bref, une plongée dans les années 80 londoniennes entre féminisme et crime glamour.

Prochainement en France

 

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