7 Mars 2025
Les histoires vraies ont un impact particulier lorsqu'elles sont racontées avec justesse, émotion et profondeur. A Cruel Love: The Ruth Ellis Story, une mini-série en quatre épisodes, revient sur l’affaire de Ruth Ellis, dernière femme à avoir été exécutée au Royaume-Uni en 1955. Avec Lucy Boynton dans le rôle-titre et Toby Jones dans celui de son avocat, cette production cherche à capturer la complexité d’une affaire judiciaire qui continue de diviser les opinions. L’un des points forts de la mini-série réside dans sa mise en scène oppressante, qui sert à merveille l’histoire tragique de Ruth Ellis.
Ruth Ellis, une hôtesse de boîte de nuit est pendue à l'âge de 28 ans en 1955 après avoir tiré mortellement sur son amant violent David Blakely.
Dès la première scène, le ton est donné : l’image est serrée, étouffante, presque inconfortable. Ce choix stylistique illustre parfaitement la spirale infernale dans laquelle l’héroïne se trouve piégée. Lucy Boynton livre une performance nuancée, incarnant Ellis avec un mélange d’élégance, de détermination et de vulnérabilité. Face à elle, Toby Jones, impeccable comme toujours, campe un avocat visiblement dépassé par l’ampleur du drame qui se joue. Pourtant, malgré ces atouts, A Cruel Love peine parfois à s’élever au-dessus d’un récit trop balisé, manquant d’un véritable point de vue sur son sujet.
La série explore la relation destructrice entre Ruth Ellis et David Blakely, un pilote automobile charismatique mais violent, dont l’attitude brutale est à l’origine du geste irréparable commis par Ellis. Leur dynamique de couple est au centre du récit, et le contraste entre leurs milieux sociaux renforce l’injustice sous-jacente.
Cependant, la manière dont la série dépeint Blakely et les autres hommes de l’histoire manque de finesse. Tous sont décrits comme des figures négatives, réduits à des archétypes de domination et de cruauté. Ce choix narratif, s’il souligne la position précaire d’Ellis dans une société patriarcale, manque de subtilité et nuit à la complexité de l’histoire.
L’un des aspects les plus frustrants de A Cruel Love est son manque d’engagement sur les questions de justice et de peine de mort. Ruth Ellis n’a jamais nié son crime, mais la série ne parvient pas à explorer avec profondeur le contexte juridique de son exécution. En 1955, la notion de responsabilité atténuée n’existait pas encore dans la loi britannique. Deux ans plus tard, un crime comme celui d’Ellis aurait pu être jugé différemment. Ce détail est mentionné en toute fin de série, mais il aurait mérité un traitement plus approfondi.
Plutôt que de véritablement questionner l’équité du système judiciaire, la narration semble davantage insister sur l’inéluctabilité du destin de Ruth Ellis, sans apporter une réelle perspective critique. Malgré ses qualités, A Cruel Love souffre d’une direction artistique inégale. Les décors, censés restituer l’Angleterre des années 50, manquent de réalisme et d’authenticité. Certaines scènes semblent presque anachroniques, avec des choix esthétiques qui rappellent davantage une production théâtrale que la reconstitution minutieuse attendue pour une série historique.
De même, les dialogues manquent parfois de naturel. Certaines répliques sonnent artificielles et ne collent pas toujours avec le contexte social de l’époque. Ce décalage nuit à l’immersion et empêche de ressentir pleinement la tragédie humaine qui se joue sous nos yeux. Le dernier épisode est sans doute le plus poignant de la série. Il retrace les ultimes tentatives de sauvetage d’Ellis, l’implication ambiguë de Desmond Cussen et les failles d’un système judiciaire rigide. Pourtant, cette montée en intensité arrive trop tard. La série peine à donner une vision cohérente de Ruth Ellis, oscillant entre fascination et distance, sans jamais véritablement lui rendre justice.
A Cruel Love: The Ruth Ellis Story avait tous les éléments pour être une série marquante : une histoire tragique, des performances solides et un contexte historique fascinant. Pourtant, elle reste en surface, sans véritablement creuser les dilemmes moraux et sociétaux qu’elle soulève. Si Lucy Boynton brille dans le rôle d’Ellis, la série échoue à proposer une réflexion nuancée sur la justice, la condition féminine et la peine de mort. Un sujet aussi fort méritait mieux qu’une reconstitution académique et parfois maladroite.
Note : 5/10. En bref, inspiré de l’histoire vraie de Ruth Ellis, la dernière femme condamnée à mort au Royaume-Uni, A Cruel Love: The Ruth Ellis Story offre une reconstitution soignée mais un traitement assez inégal. Pour ceux qui cherchent à comprendre l’histoire de Ruth Ellis, d’autres œuvres offrent une approche plus aboutie et plus engageante.
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