4 Avril 2025
Les épisodes 5 et 6 de la troisième saison de Bosch: Legacy forment un tournant brutal dans l’évolution de la série. Plus qu’une suite logique à la tension des premiers épisodes, ces deux volets explorent la fragilité des équilibres personnels et institutionnels qui entourent les personnages. Le climat politique se durcit, la violence frappe au moment où on s’y attend le moins, et certaines pertes imposent un rythme plus introspectif. L’événement marquant de cet arc narratif reste sans aucun doute l’assassinat de Jimmy Robertson.
Ce détective, connu de longue date dans l’univers de Bosch, voit son parcours s’interrompre brutalement après une scène anodine : un simple passage par un food truck. Ce meurtre, apparemment aléatoire, dévoile rapidement une organisation en arrière-plan. La mise en scène délibérée, débouchant sur une véritable exécution, brise net le fil narratif habituel et pousse Harry Bosch dans une zone encore plus trouble. Le regard de Bosch en dit long. Pas besoin de dialogues surjoués ou de réactions exagérées : c’est dans les silences que la perte se fait sentir. Sa manière d’encaisser l’information, d’absorber le choc sans s’effondrer, donne à cette séquence une puissance particulière.
La disparition de Robertson laisse un vide à plusieurs niveaux : professionnel, émotionnel, narratif. Ce n’est pas un simple retrait de personnage, mais un ébranlement dans l’écosystème de la série. En parallèle, Honey Chandler accède à un poste qu’elle convoitait depuis longtemps : celui de procureure du comté de Los Angeles. Une victoire politique qui, si elle paraît symbolique, est aussitôt nuancée par la réalité du pouvoir. Le personnage doit désormais composer avec les rouages d’une institution marquée par des tensions internes et une pression constante.
Le personnage de Pike, interprété avec retenue par Tim DeKay, incarne ce contrepoids idéal à Chandler. Son approche du dossier pénal contre le meurtrier présumé de Robertson démontre à la fois son expérience et sa frustration face à l’entrée en matière prudente de Chandler. Ce face-à-face offre un terrain de jeu fertile pour les futurs développements du bureau du procureur. Le dialogue final entre eux, simple verre partagé en fin de journée, en dit long sur les tensions à venir. Du côté de Maddie Bosch et de Reina Vasquez, la traque de l’équipe responsable de cambriolages violents se poursuit, mais sans atteindre la densité émotionnelle des autres arcs.
Ce n’est que lorsque Vasquez découvre que son propre neveu est impliqué dans ces crimes que la dynamique change. Ce choix de garder l’information secrète introduit un nouveau conflit de loyauté, notamment envers Maddie, déjà fragilisée par le manque de transparence de son père. Maddie se retrouve de plus en plus isolée, confrontée à des figures d’autorité qui omettent la vérité au nom de leur propre survie émotionnelle ou professionnelle. Cette accumulation de non-dits pourrait bien créer des fissures plus profondes dans ses relations. La manière dont Bosch encaisse les événements qui s'enchaînent renforce cette impression d’un homme constamment en lutte contre un monde où l’ordre est devenu une illusion.
Que ce soit par son implication dans l’affaire Gallagher ou son rôle indirect dans la mort de Robertson, chaque décision semble l’éloigner un peu plus de toute forme de rédemption. La visite qu’il rend à Siobhan Murphy pour lui annoncer la découverte des corps de ses proches figure parmi les scènes les plus sobres mais percutantes de ces deux épisodes. Il y a dans cette scène une fatigue silencieuse, comme si Bosch portait le poids de tous les échecs accumulés. Ce qui ressort de ces deux épisodes, c’est cette capacité de la série à raconter beaucoup sans en faire trop.
Loin des artifices habituels de certaines fictions policières, la force de la narration repose sur la sobriété des dialogues, la justesse des regards, et un jeu d’acteur parfaitement calibré. Les arrivées de nouveaux visages, comme celui de Tim DeKay, apportent une forme de fraîcheur sans rompre l’unité stylistique de la série. Quant à Juliet Landau, son retour en Rita Tedesco ajoute un voile de mystère supplémentaire. Chacun de ces choix semble être pensé pour équilibrer les différentes tensions à l’œuvre. Ces deux épisodes marquent une transition importante dans la saison.
La perte de Jimmy Robertson, la montée en puissance de Chandler, les secrets qui gangrènent les relations professionnelles : tout indique que la deuxième moitié de la saison sera marquée par des choix difficiles et des conséquences lourdes. Plus qu’une intrigue policière, Bosch: Legacy semble interroger la capacité des individus à naviguer dans des systèmes abîmés, où la justice n’est jamais acquise et où la vérité est rarement simple. La suite s’annonce dense, à condition que la série continue de creuser ses personnages avec la même rigueur narrative.
Note : 7/10. En bref, cette saison est clairement partie pour devenir la meilleure de la série (et c’est la dernière).
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