Your Friends and Neighbors (Saison 1, épisodes 1 et 2) : Vrais voisins, faux amis

Your Friends and Neighbors (Saison 1, épisodes 1 et 2) : Vrais voisins, faux amis

Dès le début de Vrais voisins, faux amis, la série prend le parti de scruter le quotidien avec un regard à la fois acerbe et détaché. Ce n’est pas une histoire qui cherche à enjoliver la réalité ou à offrir des solutions ; c’est plutôt une immersion dans un monde bien trop familier, où chacun tente de tenir debout malgré le poids des apparences, des frustrations accumulées et d’un confort de façade. Les deux premiers épisodes posent assez vite les bases d’un univers feutré mais tendu. L’ambiance des quartiers résidentiels bien organisés cache des conflits intérieurs bien plus profonds. Rien ne crie au drame, mais tout semble en déséquilibre.

 

Après avoir été honteusement viré, Andrew "Coop" Cooper, un gestionnaire de fonds d'investissement encore affecté par son récent divorce, décide de cambrioler les maisons de ses voisins du très aisé village de Westmont. Et les secrets et liaisons cachés derrière ces riches façades pourraient être plus sérieux qu’il ne l’avait imaginé.

 

C’est à travers Andrew que le malaise s’installe le plus frontalement. Ce personnage, manifestement usé par un quotidien sans éclat, incarne une sorte d’errance moderne : celle de l’homme que l’on croise tous les jours sans vraiment le voir, qui coche toutes les cases en surface, mais dont l’intérieur s’effrite lentement. La manière dont son travail est présenté reflète bien une réalité que beaucoup connaissent : être indispensable sans jamais être reconnu. Andrew est traité avec une indifférence presque mécanique par son entourage professionnel, notamment par un supérieur qui semble n’avoir pour seule boussole que ses propres intérêts. 

 

Ce qui se joue ici, ce n’est pas seulement un rapport de pouvoir, mais une mise en scène du vide, celui que laissent les attentes jamais comblées. Le personnage de Liv, qui pourrait dans un autre récit tenir le rôle classique de l’alliée, reste volontairement flou. Elle semble voir Andrew différemment, mais ses intentions ne sont jamais tout à fait claires. Ce flou ajoute une tension intéressante : est-elle réellement bienveillante, ou son empathie masque-t-elle autre chose ? Ce qui ressort, c’est que dans cet univers, l’entraide n’est jamais désintéressée. 

 

Chaque échange humain porte en lui une attente, parfois inconsciente, parfois assumée. Cela rend les interactions à la fois plus réalistes et plus instables. Il y a des choix visuels qui marquent, sans être appuyés. Un moment particulier illustre bien cela : Andrew seul dans un ascenseur, éclairé par une lumière presque théâtrale, pendant que les autres occupants sont absorbés dans leurs mondes respectifs. Ce genre de détail visuel souligne le sentiment d’isolement sans besoin de mots. Ce n’est pas une série qui surligne ses intentions, et c’est sans doute pour ça que l’effet fonctionne. 

 

L’ambiance générale, feutrée, laisse une place importante à l’interprétation, sans pour autant tomber dans l’abstraction. Le deuxième épisode élargit un peu le spectre en donnant plus de place à Mel. Là encore, il n’y a pas de tentative de la faire apparaître sous un jour positif ou négatif. Ce qui transparaît surtout, c’est une forme de désenchantement. Elle n’aime pas ce que sa vie est devenue, mais semble refuser d’en assumer la responsabilité. Ce qui dérange avec Mel, ce n’est pas tant son mal-être que la manière dont elle semble le projeter sur les autres. 

 

Elle incarne une certaine complaisance : celle qui empêche le changement, tout en se plaignant de l’absence de transformation. Son personnage ne cherche pas à susciter de la sympathie, ce qui est une force narrative en soi. Autour de ces figures principales gravitent d'autres personnages dont on commence à deviner les contours. Lu, par exemple, intrigue. Son comportement est plus calculé qu’il n’y paraît au premier abord. Il y a quelque chose dans son attitude qui laisse penser qu’elle n’est pas là par hasard. Sa relation avec Andrew pourrait devenir un fil rouge intéressant, selon ce qu’elle cherche à obtenir ou à découvrir.

 

Amanda Peet et Olivia Munn apportent toutes deux une présence marquée à l’écran, même si leurs rôles respectifs n’ont pas encore livré tout leur potentiel. On sent que leurs personnages ont des couches à révéler, à condition que le récit leur laisse la place de s’exprimer pleinement. Quant à Coop, il représente une autre facette du malaise ambiant. Son histoire personnelle, bien que parfois un peu en retrait, propose un angle intéressant sur ce qu’on pourrait appeler les "conséquences silencieuses" des choix de vie mal assumés. 

 

Sa sœur Ali, plus excentrique, apporte une énergie qui tranche avec le ton général, sans pour autant déséquilibrer l’ensemble. Un des éléments scénaristiques centraux pour l’instant tourne autour d’une histoire de vol. Curieusement, c’est sans doute l’arc narratif qui suscite le moins d’intérêt. Non pas qu’il soit mal écrit, mais il semble moins nourri en émotions ou en enjeux personnels. Il fonctionne surtout comme un prétexte à des interactions, un catalyseur d’événements, mais pas vraiment comme un moteur dramatique. Ce qui retient l’attention, c’est plutôt la manière dont les personnages vivent entre les lignes, dans ces moments de doute, de solitude, ou de confrontation avec eux-mêmes.

 

Ce que la série semble réussir à établir dès ces deux premiers épisodes, c’est un équilibre dans le ton. Rien n’est exagéré. Les personnages ne sont pas là pour porter un message, mais pour refléter des réalités, parfois dures, parfois absurdes, toujours humaines. Il n’y a pas de leçon de morale, ni de tentative de provoquer artificiellement une réaction. C’est probablement cette retenue qui donne à la série sa densité. Les dialogues ne cherchent pas à être mémorables, mais crédibles. Les situations ne sont pas là pour choquer, mais pour faire résonner quelque chose d’enfoui.

 

Il est trop tôt pour dire si la série tiendra ses promesses. Le démarrage est bien construit, les bases sont posées, mais tout repose maintenant sur la capacité du récit à ne pas s’enliser dans ses propres mécanismes. Si les relations entre les personnages gagnent en profondeur, et que certains arcs secondaires trouvent leur véritable rôle, Vrais voisins, faux amis pourrait devenir une exploration fine des déceptions ordinaires. Mais le risque est aussi réel : celui de s’égarer dans des redites ou de ne pas exploiter suffisamment le potentiel de certains rôles. 

 

L’histoire pourrait très bien se diluer si elle ne trouve pas le bon rythme, ni les bons contrastes. Ce que ces deux premiers épisodes offrent, ce n’est pas un spectacle flamboyant ni un suspense haletant. C’est une forme de lente immersion dans un quotidien faussement banal, où les tensions sont diffuses mais constantes. Il y a quelque chose d’agréable à se plonger dans ce genre de récit, qui ne cherche pas à divertir à tout prix, mais plutôt à poser des questions. 

 

Pas forcément des grandes questions existentielles, mais des interrogations plus intimes, plus sourdes : pourquoi persiste-t-on à jouer des rôles qui ne nous conviennent pas ? Jusqu’où peut-on aller sans se trahir ? Est-ce qu’on choisit vraiment la vie qu’on mène ? La série laisse ces interrogations flotter sans y répondre, et c’est peut-être ça, sa proposition la plus intéressante.

 

Note : 6.5/10. En bref, ce que ces deux premiers épisodes offrent, ce n’est pas un spectacle flamboyant ni un suspense haletant. C’est une forme de lente immersion dans un quotidien faussement banal, où les tensions sont diffuses mais constantes. Il y a quelque chose d’agréable à se plonger dans ce genre de récit, qui ne cherche pas à divertir à tout prix, mais plutôt à poser des questions. 

Disponible sur Apple TV+

 

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