Critiques Séries : Task. Saison 1. Episode 5.

Critiques Séries : Task. Saison 1. Episode 5.

Task // Saison 1. Episode 5. Vagrants.

 

L’épisode 5 de Task s’ouvre dans une atmosphère saturée de tension. Après les événements tragiques des précédents épisodes, chaque personnage semble au bord de la rupture, comme si le monde qu’ils ont contribué à créer se refermait sur eux. L’action se déroule dans un laps de temps très court, à peine quelques jours depuis l’enlèvement de Sam, et cette compression donne à chaque décision un poids presque suffocant. Ce qui frappe, c’est la façon dont Task resserre son intrigue. Plus rien n’est dispersé. Chaque geste, chaque mot, chaque regard semble chargé de conséquences. 

 

L’épisode agit comme une ligne de fracture : les alliances se brisent, les vérités éclatent, et les personnages se retrouvent face à ce qu’ils fuyaient depuis le début. L’univers de Task n’a jamais paru aussi petit. Tout le monde finit par se croiser, volontairement ou non. Perry retrouve la trace de Robbie en quelques minutes, simplement en suivant les mauvaises pistes laissées par les autres. La série montre bien cette impression d’étouffement propre aux villes où tout le monde se connaît. Les destins s’y entremêlent jusqu’à l’absurde : Robbie, son frère Billy et Cliff ont tous été liés au même homme, et c’est ce lien qui, peu à peu, scelle leur sort. Ce resserrement narratif donne une impression d’inévitabilité. 

L’épisode ne cherche pas à savoir si les choses vont mal tourner, mais quand. Tout est déjà en place pour que la chute survienne. Cette mécanique tragique rappelle la tension de certaines tragédies modernes : les personnages ont conscience du mur vers lequel ils courent, mais aucun n’est capable de freiner. Jusqu’ici, la série suivait un schéma assez régulier : développement des personnages, montée de la tension, puis une scène centrale d’action avant le cliffhanger final. Cet épisode casse complètement cette logique. Dès les premières minutes, plusieurs événements majeurs s’enchaînent sans transition : Perry tue Eryn, Grasso est démasqué comme la taupe infiltrée, Maeve livre Sam à la police, et Robbie prend Tom en otage.

 

Tout semble aller trop vite, mais c’est justement ce rythme désordonné qui rend l’épisode crédible. Personne n’a plus le temps de réfléchir. Les décisions se prennent dans l’urgence, les mots dépassent les pensées. Il n’y a plus d’espace pour le recul. Le ton se durcit, mais sans chercher l’esbroufe. Le chaos s’installe dans un quotidien banal : une maison, une voiture, un appel manqué. Rien n’a besoin d’exploser pour que le danger devienne réel. Depuis le premier épisode, Robbie agit comme s’il voulait redonner du sens à la mort de son frère. Il voulait que tout ce qu’il a perdu serve à construire quelque chose de meilleur. Mais à mesure que la série avance, cette quête ressemble davantage à une fuite en avant. 

Ce qu’il croyait être un acte de survie devient une succession de fautes irréversibles. À ce stade, Robbie a perdu presque tout ce qui comptait pour lui. Cliff est mort, Maeve s’éloigne, Eryn disparaît, et le peu de repères moraux qu’il lui restait s’effondre. Il a voulu réparer sa vie, mais ses tentatives n’ont fait que l’abîmer davantage. Il y a dans sa trajectoire quelque chose de profondément humain : cette idée que l’on peut s’enfoncer dans le désastre simplement parce qu’on refuse d’admettre qu’il est trop tard. Robbie incarne cette obstination, ce besoin de croire qu’un nouveau départ reste possible, même quand la réalité dit l’inverse. La rencontre entre Tom Brandis et Robbie Prendergrast constitue le cœur de cet épisode. 

 

Les deux hommes, que tout oppose, se retrouvent dans un moment suspendu entre peur, colère et résignation. Leur confrontation ne repose pas sur la violence, mais sur une tension psychologique presque intime. Tom s’introduit chez Robbie sous un faux prétexte, espérant le piéger ou, peut-être, le comprendre. Robbie devine rapidement la manœuvre et inverse la situation en le prenant en otage. Ce basculement révèle leur nature profonde : l’un agit par devoir, l’autre par instinct. Leur échange en voiture est sans doute l’un des plus marquants de la série. Ils parlent de Dieu, de famille, de ce qu’il reste quand tout s’écroule. Tom, ancien croyant devenu sceptique, tente de trouver un sens à la souffrance. 

Robbie, lui, rejette l’idée même d’un plan supérieur. Pour lui, croire serait un luxe, une manière de nier la responsabilité de ses actes. Ce dialogue met en lumière ce que la série réussit souvent très bien : faire cohabiter la tension policière et la réflexion morale, sans tomber dans le discours. Ce que vit Tom dans cet épisode agit comme une révélation. Menacé, désarmé, il réalise ce qu’il a perdu en se coupant de ses enfants. Cette prise de conscience n’est pas spectaculaire, mais elle donne une nouvelle direction à son personnage. Lorsqu’il pense mourir, son seul désir est de leur parler, de rétablir un lien avant qu’il ne soit trop tard. Cette vulnérabilité contraste avec son attitude distante depuis le début. 

 

Même dans la peur, Tom reste digne, conscient que le pardon ne se réclame pas, qu’il se mérite. C’est peut-être ce qui le distingue de Robbie, qui agit encore avec l’espoir illusoire de réparer l’irréparable. Le moment où Tom est relâché, après leur conversation, sonne presque comme un échange tacite entre deux hommes qui ont compris qu’ils ne sortiraient pas indemnes de cette histoire. Pendant ce temps, Perry continue sa descente vers la brutalité. Sa manière d’éliminer Eryn, presque machinale, montre à quel point il est désormais gouverné par la peur de perdre son autorité. Il agit pour protéger son empire, mais cette protection passe par la destruction.

La scène de la noyade d’Eryn est traitée sans emphase, presque comme un geste administratif. C’est ce détachement qui la rend difficile à regarder. Perry ne tue pas par plaisir, mais parce qu’il ne voit plus d’autre moyen de maintenir l’ordre. À travers lui, Task explore la violence comme un langage du pouvoir. Chaque coup, chaque mort, sert à réaffirmer un contrôle qui lui échappe un peu plus à chaque épisode. La découverte que Grasso est la taupe du FBI apporte une autre couche de complexité à l’intrigue. Ce n’est pas tant le quoi de la révélation qui importe que le comment. Elle arrive sans préparation, presque dans le flot d’autres événements, comme si la série voulait rappeler que personne n’a le luxe d’assimiler les choses à mesure qu’elles surviennent.

 

Grasso apparaît comme un personnage double : il a trahi, mais il reste humain dans sa trahison. Ses motivations ne sont pas encore claires, et cette ambiguïté rend la suite plus incertaine. Dans un monde où tout le monde semble mentir, il devient difficile de distinguer les traîtres des survivants. L’épisode reprend certains motifs déjà présents dans le pilote : le lac, les oiseaux, la nature observée comme un miroir des personnages. La comparaison entre les “vagrants”, ces oiseaux égarés hors de leur trajectoire, et Robbie, qui a perdu le sens de sa route, fonctionne sans prétention. Le symbole est limpide : certains êtres s’éloignent tellement de leur environnement d’origine qu’ils ne peuvent plus revenir. 

Robbie le comprend, mais trop tard. Il sait qu’il ne retrouvera ni sa famille, ni la paix. Ces métaphores naturelles, discrètes, donnent à la série une dimension mélancolique. Elles rappellent que Task n’est pas seulement un récit policier, mais aussi une réflexion sur la dérive humaine. Malgré la densité de cet épisode, certaines séquences paraissent déséquilibrées. Les révélations s’enchaînent sans toujours respirer, et certaines intrigues secondaires passent un peu vite, comme celle de Maeve ou d’Aleah. Pourtant, cette impression de désordre contribue aussi à la cohérence du ton. Rien n’est fluide parce que rien ne peut l’être. Le montage abrupt, les silences prolongés et la lumière crue participent à cette sensation d’inconfort. 

 

Le spectateur ne sait plus à qui faire confiance, ni vers quoi la série se dirige. L’épisode 5 marque un vrai tournant pour Task. Les masques tombent, les alliances explosent, et chaque personnage semble désormais condamné à affronter les conséquences de ses propres choix. L’affrontement entre Robbie et Tom agit comme un miroir : l’un fuit pour survivre, l’autre veut enfin affronter la vérité. Ces deux trajectoires se croisent dans un moment d’humanité inattendu, où la compassion remplace la peur. Derrière le chaos, l’épisode raconte surtout la difficulté de trouver une issue quand tout semble déjà perdu. Task continue d’explorer cette frontière entre culpabilité et rédemption, dans un monde trop petit pour offrir la moindre échappatoire.

 

Note : 7/10. En bref, l’épisode 5 de Task désoriente sa structure habituelle pour plonger ses personnages dans une spirale de désespoir et de lucidité, mais malgré des scènes fortes entre Tom et Robbie, il peine encore à équilibrer tension narrative et cohérence émotionnelle.

Disponible sur HBO max

 

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