Critiques Séries : The Last Frontier. Saison 1. Episode 4.

Critiques Séries : The Last Frontier. Saison 1. Episode 4.

The Last Frontier // Saison 1. Episode 4. American Dream.

 

L’épisode 4 de The Last Frontier marque un tournant dans cette première saison. Après le chaos laissé par l’épisode précédent, celui-ci se recentre sur les conséquences. Il ne s’agit plus seulement de poursuites dans la neige ou de coups de feu dans le silence du grand Nord. Cette fois, la série s’attarde sur ce que chaque décision coûte à ceux qui la prennent. Ce rythme plus maîtrisé donne à l’épisode une dimension morale bien plus marquée, presque suffocante par moments. Depuis le début, Frank Remnick apparaît comme un marshal écartelé entre son devoir et sa conscience. Cet épisode le met face à la réalité brute de ce dilemme. 

 

Sa détermination à retrouver les fugitifs se heurte à une question plus intime : jusqu’où aller pour faire régner l’ordre sans devenir lui-même un rouage d’un système qu’il ne comprend plus ? C’est cette tension, bien plus que les fusillades ou les tempêtes, qui donne tout son relief à cet épisode. Dans cet épisode, Frank n’est plus seulement l’homme d’action qu’on suivait jusque-là. Le regard change. La caméra s’attarde davantage sur ses hésitations, ses silences, sa manière de retenir ses colères. Il n’est pas simplement hanté par la mort de sa fille ou par son passé à Chicago, il est désormais prisonnier de ce qu’il représente : la loi dans un territoire où plus rien ne semble la respecter.

 

Ce qui m’a frappé, c’est la façon dont la série ose le rendre faillible. Frank prend des décisions discutables, ment à ses collègues, dissimule des éléments, tout en continuant à se présenter comme celui qui détient la vérité. Le scénario joue sur cette zone grise avec justesse : le spectateur n’a plus de repère moral solide, exactement comme lui. Sa relation avec Sidney amplifie ce trouble. Depuis leurs premiers échanges, il est clair qu’une méfiance s’est installée entre eux, mais ici, cette méfiance devient presque une forme de dépendance. Chacun semble avoir besoin de l’autre pour avancer, tout en sachant que cette alliance repose sur des secrets. 

 

Ce déséquilibre nourrit une tension constante, subtile, qui se ressent à chaque regard, à chaque silence. L’épisode 4 pousse Sidney dans ses retranchements. Sa position au sein de la CIA est fragilisée, son passé avec Havlock ressurgit, et ses intentions restent troubles. Est-elle réellement en quête de justice ou tente-t-elle simplement de réparer ses propres fautes ? Rien n’est clair, et c’est justement ce flou qui rend le personnage intéressant. Ce qui ressort surtout, c’est sa lucidité. Sidney sait qu’elle n’est plus maîtresse du jeu. Chaque mouvement qu’elle entreprend semble calculé pour limiter la casse, mais la série montre aussi ses fêlures, sans la transformer en héroïne lisse. 

 

Ce mélange de contrôle et de fragilité lui donne enfin une consistance que je trouvais jusque-là absente. La révélation de son lien personnel avec Havlock continue d’alimenter cette ambiguïté. Plutôt que de s’appuyer sur des dialogues explicatifs, l’épisode préfère laisser parler les silences et les regards. Cette retenue donne plus de poids à leurs retrouvailles à distance : deux anciens complices, désormais ennemis, mais toujours connectés par quelque chose d’indicible. Si Havlock reste en retrait pendant une partie de l’épisode, sa présence se fait sentir à chaque instant. Il agit comme un fantôme qui tire les ficelles sans jamais se montrer totalement. 

 

Son influence s’étend sur les personnages, sur les événements, sur l’atmosphère même de Fairbanks. Là où les précédents épisodes le présentaient comme un simple fugitif charismatique, celui-ci confirme qu’il est bien plus qu’un ennemi à abattre. Il est une idée, presque une métaphore : celle du chaos rationnel, de la vengeance qui s’orchestre avec méthode. Sa manière d’utiliser les autres, d’anticiper leurs réactions, crée un malaise fascinant. À travers lui, la série questionne la manipulation institutionnelle. Qui détient vraiment le pouvoir ? La CIA, qui cache ses erreurs ? Ou celui qui, en connaissant leurs secrets, devient leur juge ? 

 

Cette réflexion donne une épaisseur inattendue au récit, même lorsque l’action prend le dessus. Parallèlement, l’épisode met davantage en avant deux fugitives : Kitty et Viv. Leur cavale apporte un contrepoint brut à l’intelligence stratégique de Havlock. Là où lui planifie, elles improvisent. Là où il contrôle, elles déchaînent. Leur duo fonctionne précisément parce qu’il échappe aux codes. Viv agit par instinct, Kitty par survie. Elles ne cherchent pas à semer le chaos, mais elles le provoquent naturellement. Ce qui m’a plu dans leur trajectoire, c’est la façon dont la série leur accorde de la place sans les traiter comme de simples “méchantes de passage”. Leur violence a un sens, leur peur aussi.

 

Leur passage crée des répercussions à Fairbanks : policiers débordés, habitants en panique, agents désorientés. Chaque action semble avoir un effet domino, et c’est dans ce réseau de conséquences que l’épisode trouve son équilibre. Parmi ce désordre, Kira émerge comme un repère inattendu. Son rôle, jusque-là secondaire, prend ici une importance nouvelle. Là où les adultes se perdent dans leurs mensonges et leurs stratégies, elle agit avec une clarté que les autres ont perdue. Sa manière de décrypter les messages, de comprendre les intentions cachées de Havlock, apporte un souffle différent à la narration. 

 

Ce personnage, plus rationnel que héroïque, illustre bien l’un des thèmes récurrents de la série : l’intelligence face à la force brute. Kira n’est pas là pour sauver le monde, mais pour comprendre ce qui le détruit. Et cette approche donne un contraste bienvenu dans un épisode dominé par la tension. La conclusion de l’épisode ne cherche pas à rassurer. Rien n’est résolu, tout est suspendu. Kitty disparaît, Viv s’échappe, et Frank se retrouve plus isolé que jamais. Même sa maison semble devenir un piège. Il y cache des secrets qui, tôt ou tard, referont surface. Ce choix narratif fonctionne, car il refuse la facilité. Au lieu de clore les arcs, l’épisode les entrelace davantage. 

 

Chacun des protagonistes semble désormais avancer à vue, mû par la peur ou la culpabilité. Et c’est cette incertitude qui maintient l’intérêt : personne ne paraît réellement en sécurité, ni moralement, ni physiquement. Ce quatrième épisode redéfinit le ton de The Last Frontier. Là où les premiers jouaient sur l’action et la mise en place, celui-ci assume une approche plus introspective. Le spectacle visuel cède la place à une écriture plus resserrée, centrée sur les dilemmes et les alliances fragiles. C’est aussi le moment où la série commence à interroger sa propre nature : est-ce une chasse à l’homme ou une étude du mensonge ? Derrière les hélicoptères et les fusillades, ce qui subsiste, c’est la question de la loyauté. 

 

Chacun trahit quelque chose ou quelqu’un, parfois sans même s’en rendre compte. The Last Frontier continue donc d’avancer à travers la neige, en creusant davantage ses personnages que ses intrigues. Et c’est précisément ce glissement vers la complexité morale qui me donne envie de voir la suite. Pas pour savoir qui attrapera qui, mais pour comprendre qui finira par se perdre le plus dans cette frontière où la vérité fond plus vite que la glace.

 

Note : 7.5/10. En bref, The Last Frontier continue donc d’avancer à travers la neige, en creusant davantage ses personnages que ses intrigues. 

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