Critiques Séries : The Morning Show. Saison 4. Episode 5.

Critiques Séries : The Morning Show. Saison 4. Episode 5.

The Morning Show // Saison 4. Episode 5. Amari.

 

L’épisode 5 de la saison 4 de The Morning Show, intitulé « Amari », repose sur une étrange dualité. D’un côté, il y a une écriture puissante, ancrée dans la douleur et la vulnérabilité de certains personnages ; de l’autre, un désordre narratif qui continue d’alourdir la série. Tout commence par une tension mal contenue entre Bradley et Cory, et se termine sur une note amère, comme si la série refusait de choisir ce qu’elle voulait raconter. Pourtant, au milieu de ce chaos, quelques scènes parviennent à sortir du lot, notamment celles portées par Chris et Mia, qui redonnent enfin un peu de chair à cette saison. L’épisode s’ouvre sur une séquence entre Bradley et Cory, censée explorer leur relation mais qui sonne surtout comme un énième détour inutile. 

 

Leur dynamique, oscillant entre manipulation et complicité, ne trouve plus vraiment de sens. Bradley joue un double jeu, cherchant des preuves liées au scandale de Wolf River tout en feignant une proximité sincère avec Cory. De son côté, lui conserve ce vernis de charme calculé qui cache mal une paranoïa grandissante. Le dialogue entre eux devient un terrain de méfiance, et tout ce qui pourrait ressembler à de la tendresse se transforme en prétexte narratif. Cette partie de l’épisode peine à convaincre, surtout quand on voit à quel point elle détourne l’attention du cœur émotionnel du récit. Ce cœur, c’est Chris. L’épisode « Amari » prend tout son sens à travers elle. Accusée d’avoir utilisé des produits dopants à l’époque où elle dominait les pistes d’athlétisme, elle se retrouve soudain projetée au centre d’un scandale médiatique. 

L’accusation vient d’un ancien coéquipier, Tunde, dont la rancune et la jalousie paraissent d’abord évidentes. Ce qui frappe ici, ce n’est pas tant la rumeur que la manière dont elle se propage : le doute devient spectacle, la douleur devient contenu. The Morning Show a souvent voulu dénoncer le cynisme des médias ; cette fois, la série le met en scène avec une brutalité plus crédible que d’habitude. Chris choisit de ne pas se cacher. Contre toute prudence, elle accepte d’aller défendre sa version face à Tunde, dans un talk-show où l’audience se nourrit du malheur des autres. C’est un choix désespéré, mais aussi profondément humain. Elle veut se réapproprier son histoire, quitte à s’y brûler. 

 

L’entretien tourne mal : les « preuves » de Tunde tombent comme un couperet, et Chris finit par avouer. Dans ce moment suspendu, la série trouve enfin une justesse qu’elle cherche depuis longtemps. Il n’y a plus de mise en scène, plus de filtre. Seulement une femme, une mère, qui parle de son fils perdu, de la honte et du deuil, et de cette volonté de survivre malgré tout. Ce monologue est sans doute l’un des passages les plus forts de la saison. Chris raconte comment, après la perte de son enfant, elle s’est retrouvée brisée — physiquement, psychologiquement, professionnellement. Les stéroïdes n’étaient pas une ambition de gloire mais un moyen de reprendre pied. 

Ce qu’elle admet à ce moment-là n’est pas seulement une faute sportive, mais une humanité imparfaite. Ce n’est pas un plaidoyer, c’est une confession. Et c’est précisément parce qu’elle ne cherche pas à se racheter que sa parole touche. La mise en scène de cette séquence évite le pathos facile : pas de musique dramatique, pas de larmes surjouées. La caméra reste proche, presque immobile, laissant le silence peser plus que les mots. Dans cet espace étroit, la douleur circule, et on sent à quel point Chris a longtemps porté ce poids seule. Quand elle retrouve Marcus après l’interview, la tension se dissout dans un échange d’une simplicité désarmante. Elle s’effondre, il pleure, et au lieu d’une réconciliation spectaculaire, il y a juste une forme de fatigue partagée. 

 

Ce moment-là dit tout : la chute, mais aussi la possibilité ténue d’une reconstruction. En parallèle, Mia Jordan suit sa propre trajectoire, plus discrète mais tout aussi importante. Depuis son départ de UBA, elle cherche une nouvelle place, un espace où elle pourrait enfin exister sans devoir se conformer. Son entretien avec Defy Media laisse entrevoir cette liberté : un lieu où elle pourrait respirer, travailler autrement, sans devoir masquer ce qu’elle est. La joie qui suit cette rencontre est sincère, presque communicative. Et c’est précisément pour cela que la désillusion qui vient ensuite frappe aussi fort. Quand Alex intervient sous prétexte de l’aider, la situation se retourne. Mia comprend trop tard que ce geste soi-disant bienveillant a pour effet de lui barrer la route. 

Derrière les beaux discours, c’est encore une histoire de pouvoir et de contrôle. Alex veut la garder, ou du moins empêcher qu’une autre structure ne profite de son talent. Ce genre de manipulation passive-agressive est typique du milieu que la série décrit : un univers où la solidarité féminine affichée se transforme souvent en hiérarchie déguisée. La réaction de Mia, quand elle réalise ce qui s’est passé, traduit toute la colère rentrée accumulée depuis plusieurs saisons. Il y a dans son regard quelque chose de froid, une lassitude lucide. Elle a compris que personne ne la sauvera, qu’il faudra s’imposer autrement. Sa confrontation avec Alex ne cherche pas le drame : elle pose simplement les limites, sans hausser la voix, sans justification. 

 

À ce moment-là, le personnage semble enfin libre. L’épisode lie subtilement ces deux parcours — celui de Chris et celui de Mia — autour d’un même thème : reprendre le contrôle de son récit. Chacune, à sa manière, refuse l’humiliation, refuse qu’on parle à sa place. L’une le fait devant des millions de spectateurs, l’autre dans un bureau silencieux. Mais les deux actes ont la même portée : un geste de survie. Ce contraste entre authenticité et opportunisme traverse tout l’épisode. D’un côté, des personnages qui tentent d’exister dans un système médiatique vorace ; de l’autre, des figures comme Cory et Bradley, piégées dans leurs propres jeux d’influence. Bradley, notamment, perd de plus en plus en cohérence. Son obsession pour la vérité se heurte à son besoin de reconnaissance. 

Quant à Cory, il reste fidèle à lui-même : toujours dans la justification, toujours convaincu que ses manigances servent un but plus noble. Leur face-à-face, quand il découvre qu’elle fouille ses mails, résume leur relation : deux prédateurs qui ne savent plus pourquoi ils se battent. L’épisode se termine sur une note d’incertitude. Bradley, désormais isolée, retrouve un agent du FBI chez elle. Chris tente de recoller les morceaux, Mia réfléchit à la suite, Alex continue de gérer les conséquences de ses choix. Chacun semble sur le point de franchir un nouveau seuil, mais la série laisse volontairement ces portes entrouvertes. 

 

Ce cinquième épisode n’est pas sans défauts — certaines intrigues secondaires paraissent oubliées ou expédiées —, mais il a le mérite de recentrer The Morning Show sur ce qu’elle sait encore faire : explorer la complexité humaine derrière les écrans et les slogans. Même dans sa confusion, l’épisode « Amari » montre à quel point la série peut être pertinente quand elle arrête de chercher à plaire et se contente de raconter la vérité émotionnelle de ses personnages. Peut-être que la force de The Morning Show ne réside plus dans sa vision des médias, devenue trop caricaturale, mais dans ces fragments intimes où les personnages cessent de jouer un rôle. Ce que Chris et Mia incarnent ici dépasse la fiction : la lutte pour exister dans un environnement qui, constamment, déforme ce que l’on est.

 

Note : 6.5/10. En bref, l’épisode montre à quel point la série peut être pertinente quand elle arrête de chercher à plaire et se contente de raconter la vérité émotionnelle de ses personnages. Peut-être que la force de The Morning Show ne réside plus dans sa vision des médias mais dans ces fragments intimes où les personnages cessent de jouer un rôle.

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