30 Septembre 2024
Hors-Saison // De Stéphane Brizé. Avec Guillaume Canet, Alba Rohrwacher et Sharif Andoura.
Le dernier film de Stéphane Brizé, Hors-Saison, s'inscrit dans une veine intimiste qui semble vouloir s’éloigner des drames sociaux marquants auxquels il nous avait habitués. Après la trilogie acclamée autour du monde du travail (La Loi du marché, En guerre, Un autre monde), Brizé délaisse son acteur fétiche Vincent Lindon pour s’intéresser à une histoire de retrouvailles amoureuses entre Mathieu, un acteur dépressif incarné par Guillaume Canet, et Alice, une femme qu’il a aimée quinze ans plus tôt, jouée par l’actrice italienne Alba Rohrwacher. Pourtant, malgré le potentiel émotionnel de ce récit, le film peine à captiver. Dès le début, Hors-Saison s’impose par un rythme lent qui pourrait être justifié par la thématique de l’introspection et du mal-être. Mathieu, en pleine crise existentielle, se retrouve en thalassothérapie pour réfléchir à sa vie, un contexte propice à l’ennui et à la contemplation.
Mathieu habite Paris, Alice vit dans une petite cité balnéaire dans l’ouest de la France. Il caresse la cinquantaine, c’est un acteur connu. Elle a dépassé la quarantaine, elle est professeure de piano. Ils se sont aimés il y a une quinzaine d’années. Puis séparés. Depuis, le temps est passé, chacun a suivi sa route et les plaies se sont refermées peu à peu. Quand Mathieu vient diluer sa mélancolie dans les bains à remous d’une thalasso, il retrouve Alice par hasard.
Malheureusement, ce qui aurait pu être un exercice subtil de mélancolie devient rapidement un obstacle à l’immersion du spectateur. La mise en scène de Brizé, habituellement percutante, semble ici s’essouffler sous le poids de la monotonie. La lenteur du film devient ainsi un frein majeur à l’émotion. Chaque scène s'étire sans réelle intensité, avec des moments parfois absurdes de vacuité. Une séquence, notamment, où une réceptionniste tapote silencieusement sur son ordinateur devant un Canet stoïque, semble s’éterniser inutilement. Ces choix de mise en scène, loin de renforcer l’atmosphère mélancolique, finissent par ennuyer, voire frustrer. Le problème de Hors-Saison réside également dans son scénario, qui semble tenir sur un fil. L’intrigue des retrouvailles entre Mathieu et Alice aurait pu être un terreau fertile pour explorer des émotions profondes, mais elle reste malheureusement superficielle. Les enjeux de cette relation sont à peine esquissés, et le film manque de la folie ou de la passion nécessaire pour transcender cette histoire de reconquête amoureuse.
Tout est trop propre, trop lisse, à l’image des ciels gris de Bretagne qui servent de toile de fond. Ce manque de substance scénaristique est d'autant plus regrettable que les précédents films de Brizé excellaient dans leur capacité à traiter des sujets sociaux complexes avec profondeur et subtilité. Ici, le réalisateur semble avoir perdu cette étincelle, laissant place à un récit plat et convenu. Guillaume Canet se retrouve ici piégé dans un rôle qui ne lui rend pas justice. Mathieu, cet acteur célèbre en crise, est un personnage terne, sans véritable aspérité. Pendant la majorité du film, Canet affiche une expression maussade, comme s’il portait le poids du monde sur ses épaules, mais sans jamais vraiment parvenir à transmettre une émotion sincère. Son jeu minimaliste, qui aurait pu être touchant, devient répétitif et finit par lasser. À ses côtés, Alba Rohrwacher apporte une certaine douceur et délicatesse à son rôle. Son interprétation est sans doute l’une des rares qualités du film, mais elle ne suffit pas à rattraper l’absence de tension dramatique.
Le charme qu'elle insuffle à son personnage ne peut compenser la faiblesse du scénario et la mollesse ambiante. Il est indéniable que Hors-Saison bénéficie d’une photographie soignée. Les paysages bretons, avec leurs plages désertes et leurs maisons fermées, offrent une esthétique visuellement plaisante. Toutefois, cette beauté visuelle ne parvient pas à dynamiser le film. La Bretagne, hors saison, devient le reflet parfait de l’ennui qui se dégage de cette histoire. Les paysages marins, bien que beaux, ne suffisent pas à compenser l'absence de rythme et de tension narrative. En termes de récits d’amour contrarié, on ne peut s’empêcher de comparer Hors-Saison à Past Lives, un film sorti récemment qui, lui, parvient véritablement à émouvoir. Là où Past Lives traite avec finesse et émotion des regrets et des amours passées, Hors-Saison échoue à créer une réelle connexion avec ses personnages. On regarde les événements se dérouler sans jamais être touché au cœur.
En conclusion, Hors-Saison est une déception. Stéphane Brizé, qui nous avait habitués à des films poignants et socialement engagés, livre ici une œuvre qui manque cruellement de souffle. La lenteur du rythme, le scénario pauvre et le manque d’émotion en font un film difficile à suivre, malgré la belle performance d’Alba Rohrwacher et les paysages sublimes de la Bretagne. Guillaume Canet, quant à lui, reste enfermé dans un rôle qui ne lui permet pas de briller. Pour ceux qui cherchent une histoire d’amour authentique et poignante, Hors-Saison n’est malheureusement pas à la hauteur des attentes. Un film à éviter, sauf pour les plus grands fans de Canet et Brizé, ou pour ceux qui cherchent un somnifère visuel…
Note : 3/10. En bref, quand la lenteur du récit devient un frein à l’émotion.
Sorti le 20 mars 2024 au cinéma - Disponible en VOD
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