Critique Ciné : Le Roman de Jim (2024)

Critique Ciné : Le Roman de Jim (2024)

Le Roman de Jim // De Arnaud et Jean-Marie Larrieu. Avec Karim Leklou, Laetitia Dosch et Sara Giraudeau.

 

Le Roman de Jim, dernier film des frères Arnaud et Jean-Marie Larrieu, se révèle être une œuvre profondément émotive et subtilement construite, qui plonge au cœur des thèmes de la paternité et des relations familiales complexes. Cette adaptation du roman éponyme de Pierric Bailly, publié en 2021, s'affirme comme un véritable bijou cinématographique, où chaque détail, chaque silence, chaque regard contribue à créer une atmosphère poignante et sincère. Contrairement à ce que le titre pourrait laisser penser, Le Roman de Jim n'est pas centré sur l'enfant, mais bien sur Aymeric, un homme ordinaire incarné avec une justesse désarmante par Karim Leklou. Le film nous invite à suivre la vie de ce personnage, un père de substitution qui, malgré les coups du sort, conserve une bonté rare et une résilience à toute épreuve.

 

Aymeric retrouve Florence, une ancienne collègue de travail, au hasard d’une soirée à Saint-Claude dans le Haut-Jura. Elle est enceinte de six mois et célibataire. Quand Jim nait, Aymeric est là. Ils passent de belles années ensemble, jusqu'au jour où Christophe, le père naturel de Jim, débarque... Ça pourrait être le début d’un mélo, c’est aussi le début d’une odyssée de la paternité.

 

L'histoire débute de manière presque banale : Aymeric, après une peine de prison liée à une erreur de jeunesse, rencontre Florence (Laëtitia Dosch), une femme enceinte dont il tombe amoureux. Il accepte de devenir le père du petit Jim, l'enfant qu'elle attend d'un autre homme, Christophe. Pendant sept ans, ils vivent heureux dans une ferme isolée du Haut-Jura, jusqu'au jour où Christophe réapparaît, bouleversant cet équilibre fragile. Florence décide alors de partir avec Christophe et Jim pour le Canada, laissant Aymeric seul et dévasté. Ce film, qui pourrait facilement sombrer dans le pathos, évite cet écueil grâce à une écriture et une mise en scène empreintes de sobriété. Les frères Larrieu maîtrisent l'art du mélo sans jamais tomber dans l'excès, nous offrant un récit où l'émotion affleure sans jamais être forcée. On est loin du mélo classique, avec des larmes faciles et des situations surjouées. Ici, la douleur est subtile, réelle, et elle touche d'autant plus qu'elle est suggérée plutôt qu'étalée.

 

Karim Leklou livre une prestation impressionnante, habillant Aymeric d'une humanité qui touche profondément. Cet acteur, que j'apprécie particulièrement pour ses rôles dans des œuvres comme Coup de chaud ou BAC Nord, incarne ici un homme simple, d'une gentillesse désarmante, qui accepte son sort avec une résilience admirable. Son jeu, tout en retenue, donne vie à un personnage qui aurait pu être fade, mais qui, sous sa direction, devient un modèle de bienveillance et de force tranquille. Il est accompagné par deux actrices au talent indéniable, Laëtitia Dosch et Sara Giraudeau, qui incarnent des femmes à la fois fortes et vulnérables, naviguant entre leurs propres désirs et les attentes sociétales. Leur interprétation est tout aussi nuancée que celle de Leklou, et elles apportent une profondeur supplémentaire à cette histoire de liens familiaux complexes.

 

Le Roman de Jim aborde avec une grande délicatesse la question de la paternité, en explorant les aspects biologiques et affectifs de ce lien fondamental. Le film nous interroge sur ce qui fait réellement un père : est-ce le sang ou bien l'amour et les soins prodigués au fil des ans ? Aymeric, qui n'a aucun lien de sang avec Jim, se révèle pourtant être le père le plus aimant et le plus présent. C'est lui qui se lève la nuit, qui console, qui éduque, et pourtant, il se voit dépossédé de ce rôle lorsque le père biologique réapparaît. Ce thème est traité avec une grande subtilité, sans jamais sombrer dans la caricature. Les Larrieu ont su éviter le piège du film à thèse, préférant laisser les spectateurs se faire leur propre opinion sur ces questions complexes. La simplicité apparente du scénario cache en réalité une réflexion profonde sur la place des sentiments dans les relations familiales, et sur le rôle que chaque parent peut jouer, même en dehors des liens biologiques.

 

En fin de compte, Le Roman de Jim s'impose comme l'un des films les plus touchants des frères Larrieu. La beauté des paysages jurassiens, la finesse de l'écriture, et l'interprétation magistrale de Karim Leklou et de ses partenaires en font une œuvre d'une rare intensité émotionnelle. Ce film est une invitation à réfléchir sur la paternité, l'amour, et les liens qui se tissent au-delà du sang. Il ne laisse personne indifférent, tant il résonne avec une vérité et une humanité qui touchent au cœur. En sortant de la salle, on ne peut qu'applaudir cette adaptation réussie, qui parvient à capter l'essence du roman de Pierric Bailly tout en s'imposant comme une œuvre cinématographique à part entière. Un film qui, sans artifice, sans effets de manche, nous rappelle que la vraie force d'un récit réside dans sa capacité à émouvoir, simplement, sincèrement.

 

Note : 8/10. En bref, une exploration touchante de la paternité et des lieux filiaux. C’est beau, brut et profondément humain. 

Sorti le 14 août 2024 au cinéma

 

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