4 Novembre 2024
Libre // De Mélanie Laurent. Avec Lucas Bravo, Yvan Attal et Radivoje Bukvic.
Réussir un film biographique est un art délicat, surtout lorsqu’il s’agit de capturer la complexité d’une figure aussi fascinante que celle de Bruno Sulak, un braqueur audacieux qui a su marquer son époque par son charisme et son courage. Libre avait l’ambition de retracer l’histoire captivante de cet homme au destin peu commun, mais, à mon grand regret, ce film n’a pas su se hisser à la hauteur du personnage. Entre des choix artistiques discutables, des interprétations maladroites et une narration trop lisse, Libre m’a laissé avec un sentiment d’inachevé, voire de frustration. Dès les premières minutes, la mise en scène peine à susciter l’engouement. Les choix de cadrage et la direction artistique, censés donner du rythme et de la profondeur au récit, restent fades et sans éclat. En tentant d’éviter le sensationnalisme ou une esthétique trop stylisée, le film tombe dans un excès de sobriété, rendant les scènes d’action et de tension presque insipides.
Inspiré de faits réels, le film nous entraîne dans le sillage tumultueux de Bruno Sulak, véritable Arsène Lupin du XXème siècle. Flamboyant braqueur, ami fidèle, icône de la liberté, Bruno Sulak a marqué l’histoire du banditisme par ses braquages non violents de multiples bijouteries. Tout en étant activement recherché par George Moréas, un commissaire de police non conformiste aussi coriace que perspicace, Sulak est parvenu à s’échapper de prison à plusieurs reprises afin de retrouver Thalie, son amante et complice, devenant ainsi l’ennemi public numéro 1 des années 80
La caméra tourne en rond, littéralement, dans une séquence interminable où l’on observe Bruno entouré de ses biens, sans que cela n’apporte de valeur au récit. Plutôt que de s’attarder sur le caractère exceptionnel du personnage, le film semble se perdre dans des détails inutiles et des longueurs. Les performances des acteurs, quant à elles, n’aident malheureusement pas à compenser la faiblesse de la mise en scène. Yvan Attal, malgré son talent indéniable, semble prisonnier de son rôle, incapable de donner la profondeur nécessaire au personnage qu’il incarne. Lucas Bravo, choisi pour interpréter Bruno Sulak, offre une prestation déconcertante : il joue plus le rôle d’un fanfaron insolent que celui d’un homme profondément passionné et non-conformiste. Quant à Mélanie Laurent, elle semble être passée à côté de l’essence même du personnage, transformant ce qui aurait pu être une figure de gangster romantique en un simple cliché.
Au lieu de nous plonger dans un univers dense et complexe, les acteurs semblent s'enliser dans des stéréotypes qui trahissent la richesse de cette histoire. L’un des éléments les plus dérangeants de Libre réside dans le traitement de l’histoire vraie de Bruno Sulak. Le film semble avoir pris des libertés qui déforment la réalité, sans prendre le soin de se rapprocher de l’authenticité. Le côté rebelle et anti-conformiste de Bruno Sulak n’est qu’effleuré dans quelques dialogues, sans jamais être pleinement développé. De plus, le mystère qui entoure la mort de Sulak n’est absolument pas exploré, comme si le réalisateur avait voulu esquiver ce sujet central. Cette absence de parti pris, de point de vue artistique ou d’analyse des événements, donne une impression de superficialité qui frustre et déçoit.
Le scénario, censé être la colonne vertébrale d’un film biographique, est ici particulièrement faible. Les événements marquants de la vie de Bruno sont survolés, comme s’il s’agissait d’une simple succession de faits sans lien ni analyse. Le potentiel dramatique et émotionnel de cette histoire n’est jamais exploité. Le film aurait pu s'appuyer sur le parcours exceptionnel de Bruno Sulak pour aborder des thématiques profondes comme la liberté, le sacrifice, ou encore la rébellion face aux conventions. Malheureusement, ces thèmes sont à peine effleurés, et la narration manque cruellement de souffle et d’intensité. Libre laisse l’impression d’un récit incomplet, où la richesse de l’histoire est noyée dans une succession de scènes sans émotion ni enjeux.
Ce qui rend cette déception d’autant plus amère, c’est que Libre avait tout pour réussir. Le personnage de Bruno Sulak est un véritable trésor pour un réalisateur audacieux et visionnaire. Son histoire captivante et ses actes audacieux auraient pu donner naissance à un biopic inoubliable, voire marquer le cinéma. Cependant, malgré un potentiel indéniable, le film ne décolle jamais. Chaque scène donne l’impression d’être inaboutie, chaque dialogue semble manquer de sincérité. Ce manque de direction et de vision artistique rend le film plat et sans âme. En tant que spectateur, je me suis rapidement retrouvé à espérer une étincelle, un moment fort qui viendrait réveiller l’intrigue… en vain. L’ennui finit par prendre le dessus, et la promesse d’un film passionnant se dissipe, laissant place à une expérience cinématographique fade.
Pour ceux qui souhaitent réellement découvrir la vie de Bruno Sulak et plonger dans son histoire captivante, je ne peux que recommander le livre de Philippe Jaenada. Là où le film échoue, Jaenada parvient à captiver ses lecteurs en restituant toute la complexité et le charisme de cet homme hors du commun. Loin d’une simple biographie, son récit est vivant, immersif, et rend hommage à la personnalité unique de Bruno Sulak. À travers les mots de Jaenada, le personnage de Sulak prend vie et entraîne le lecteur dans son univers fascinant. Si Libre n’a pas su faire honneur à cette histoire, le livre, quant à lui, réussit là où le film échoue. En définitive, Libre est une occasion manquée, un biopic sans saveur qui passe à côté de son sujet. En cherchant à retranscrire la vie d’un personnage aussi intense que Bruno Sulak, le film s’est perdu dans une mise en scène sans âme, des performances en demi-teinte et un scénario trop lisse.
Au lieu de rendre hommage à cet homme fascinant, Libre ne fait que gratter la surface de son histoire. Une œuvre qui, malgré un potentiel énorme, laisse un goût amer et ne rend pas justice à un personnage aussi marquant. Pour découvrir réellement Bruno Sulak, mieux vaut se tourner vers le livre de Philippe Jaenada, qui, lui, saura toucher et fasciner ceux qui cherchent à comprendre cet homme d’exception.
Note : 4/10. En bref, un biopic décevant pour un destin hors du commun.
Sorti le 1er novembre 2024 directement sur Amazon Prime Video
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