Critique Ciné : A toute allure (2024)

Critique Ciné : A toute allure (2024)

A toute allure // De Lucas Bernard. Avec Pio Marmaï, Eye Haïdara et José Garcia.

 

Le cinéma français a une relation compliquée avec la comédie romantique. Entre les tentatives d’imiter les productions anglo-saxonnes et l’envie de conserver une touche bien française, le résultat oscille souvent entre l’inspiré et le convenu. À toute allure, le nouveau film de Lucas Bernard, s’inscrit dans cette tradition en tentant d’injecter une dose d’aventure dans une romance aux allures légères. L’intention est là, l’énergie aussi, mais tout ne fonctionne pas comme prévu. Dès les premières minutes, À toute allure annonce la couleur : ça va vite, très vite. 

 

Elle est officier de sous-marin tactique. Il est steward. Ils se rencontrent lors d’une escale. Mais leur aventure naissante doit subitement s’interrompre. Et le voilà qui s’accroche ! Qui la suit ! Qui la colle ! Comme si on avait le temps d’être amoureuse à bord d’un bâtiment militaire ! Reste que l’océan Pacifique n’est pas assez grand pour le décourager. L’océan Arctique non plus d’ailleurs. Le monde est si petit quand on s’aime d’un si grand amour...

 

Le montage, nerveux, propulse immédiatement les personnages dans une situation rocambolesque qui ne laisse pas vraiment le temps de respirer. Le réalisateur semble vouloir retrouver l’esprit des grandes comédies américaines d’antan, celles où les dialogues fusent et où le tempo ne faiblit jamais. Cette rapidité d’exécution a ses avantages. L’ennui n’a pas le temps de s’installer, et certaines répliques bien senties font mouche. Cependant, à force d’enchaîner les situations absurdes sans leur donner le temps d’exister pleinement, le film perd en consistance. 

 

Il confond parfois vitesse et précipitation, comme si l’urgence de divertir prenait le dessus sur la nécessité de construire une histoire à laquelle s’attacher. Une comédie romantique qui se déroule en grande partie dans un sous-marin, ce n’est pas banal. Ce décor atypique aurait pu être l’occasion de proposer une mise en scène inventive et de jouer sur l’enfermement pour accentuer les tensions ou les rapprochements entre les personnages. Malheureusement, cet élément de décor reste sous-exploité. Plutôt que d’en tirer un ressort comique ou dramatique fort, le film s’en sert surtout comme un prétexte à des péripéties qui peinent à trouver une véritable cohérence. 

 

Ce manque de logique interne empêche de totalement adhérer à l’histoire, comme si tout reposait uniquement sur l’énergie des acteurs pour faire fonctionner l’ensemble. Si À toute allure ne brille pas par son scénario, il peut néanmoins compter sur un casting impliqué. Pio Marmaï, fidèle à lui-même, apporte une énergie brute et un naturel qui collent bien à son personnage. Face à lui, Eye Haïdara insuffle une dose de caractère et de répartie qui évite au film de sombrer dans les clichés habituels du genre. José Garcia, quant à lui, joue un rôle secondaire qui sert d’amortisseur comique, sans jamais voler la vedette aux deux autres.

 

Là où le bât blesse, c’est dans l’alchimie entre les deux rôles principaux. Le film repose sur leur dynamique, sur cette tension entre attirance et opposition, mais la magie opère à moitié. Les dialogues suggèrent une romance naissante, mais l’émotion peine à émerger, comme si quelque chose restait en surface. Dans une comédie romantique, c’est souvent ce petit supplément d’âme qui fait la différence entre un film agréable et une histoire qui marque vraiment. La comédie est une affaire de rythme et d’équilibre. Ici, les dialogues mitraillent sans relâche, cherchant à multiplier les traits d’esprit et les situations cocasses.

 

Certains fonctionnent bien et arrachent de vrais sourires, notamment grâce au talent des acteurs qui savent donner du relief à des répliques parfois anodines. Je pense notamment à cette scène façon comédie musicale sur Le Coup de Soleil de Richard Cocciante qui m’a finalement plus plu que je n’aurais pu l’imaginer dans un tel film. D’autres tentatives tombent à plat, soit par manque de naturel, soit parce que l’accumulation de situations improbables finit par nuire à l’impact de l’humour. À toute allure assume son côté burlesque, mais ne parvient pas toujours à rendre cette fantaisie crédible. 

 

Il y a une différence entre l’absurde maîtrisé et le n’importe quoi désorganisé, et le film oscille trop souvent entre les deux. À défaut d’être une grande comédie romantique, À toute allure reste un film qui remplit son rôle de divertissement sans prétention. Il ne cherche pas à révolutionner le genre, et malgré ses défauts, il possède une énergie communicative qui empêche de totalement décrocher. Cependant, une fois sorti de la salle, difficile d’en garder un souvenir marquant. L’ensemble manque d’originalité dans son exécution et de profondeur dans son propos. 

 

Les personnages auraient mérité plus de développement, le scénario plus de cohérence, et l’humour une meilleure gestion du tempo. Le film illustre bien un problème récurrent du cinéma français contemporain en matière de comédie. À force de vouloir mélanger les influences – ici, le film d’aventure à l’américaine et la comédie romantique à l’anglaise –, il perd son identité et donne l’impression de ne jamais vraiment savoir où il veut aller. Ce n’est pas un échec total, loin de là. Mais ce n’est pas non plus une réussite franche. Il y a de bonnes intentions, des acteurs investis et une idée de départ originale, mais le tout manque de liant pour réellement fonctionner.

 

À toute allure porte bien son titre : ça va vite, parfois trop. Le film essaie de capturer l’essence des grandes comédies rythmées, mais finit par s’essouffler en route. Il reste quelques bonnes scènes, des répliques efficaces et un casting qui fait le maximum avec ce qu’il a, mais cela ne suffit pas à en faire un film mémorable. Ce n’est ni une catastrophe, ni un chef-d’œuvre. Juste une comédie romantique qui fait le job sans réellement dépasser son statut de divertissement éphémère. À voir pour passer un bon moment, sans en attendre trop.

 

Note : 5/10. En bref, une comédie romantique qui ne manque pas d’idées mais qui ne m’a pas totalement convaincu non plus. 

Sorti le 6 novembre 2024 au cinéma - Disponible en VOD

 

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