Critique Ciné : Maria (2025)

Critique Ciné : Maria (2025)

Maria // De Pablo Larraín. Avec Angelina Jolie, Pierfrancesco Favino et Alba Rohrwacher.

 

Il y a des figures qui traversent le temps, des voix qui résonnent encore bien après leur dernier souffle. Maria Callas fait partie de ces icônes dont le destin fascine autant que son talent. Avec Maria, Pablo Larraín clôt une trilogie de portraits féminins entamée avec Jackie et Spencer, en s’intéressant cette fois aux derniers jours de la célèbre cantatrice. Loin du biopic conventionnel retraçant une ascension ou une carrière, Maria s’attarde sur une fin de vie, une solitude et une voix qui s’éteint. Un choix audacieux qui permet d’approcher la Callas sous un jour plus intime, mais qui s’accompagne aussi d’une certaine langueur.

 

La vie de la plus grande chanteuse d’opéra du monde, Maria Callas, lors de ses derniers jours, en 1977, à Paris.

 

Là où Jackie et Spencer se permettaient des élans presque hallucinatoires, Maria opte pour une approche plus sobre. Le film commence par la découverte du corps inanimé de Maria Callas, puis nous ramène une semaine en arrière, dans cette ultime période où elle se retrouve face à elle-même. Pablo Larraín mise sur une mise en scène épurée, où chaque plan semble capturer la mélancolie d’un destin en déclin. Le Paris des années 1970 est reconstitué avec soin, baigné dans des teintes chaudes et nostalgiques, qui renforcent cette impression de fin de parcours.

 

Ce choix de retenue fonctionne par moments, en laissant place à une forme d’émotion plus subtile, mais il crée aussi un rythme parfois pesant. Le film prend son temps, s’attarde sur des silences, des gestes, des souvenirs qui ressurgissent sans toujours trouver un véritable écho dramatique. L’un des aspects les plus marquants de Maria reste la performance d’Angelina Jolie. Sans chercher à imiter Maria Callas physiquement, elle en capte l’essence, la posture, l’aura. Il y a une vraie justesse dans sa manière d’incarner la diva, oscillant entre fierté et fragilité.

 

Son jeu repose beaucoup sur le regard, les expressions infimes qui traduisent une douleur intérieure, un désenchantement. Lorsqu’elle chante – et c’est bien sa voix que l’on entend dans le dernier segment du film –, elle parvient à transmettre une émotion brute, qui donne à ces instants une puissance particulière. Même si le film manque parfois de dynamisme, Angelina Jolie porte son personnage avec une telle intensité qu’il est difficile de ne pas être touché. Sans doute l’un des rôles les plus maîtrisés de sa carrière. 

 

Le récit est ponctué de retours en arrière, permettant d’évoquer les moments clés de la vie de Maria Callas : son enfance en Grèce sous l’Occupation, sa relation complexe avec sa mère, son amour tumultueux avec Aristote Onassis. Ces flashbacks sont visuellement distincts du reste du film, certains en noir et blanc légèrement sépia, d’autres en couleur, mais leur traitement laisse parfois perplexe. Ils offrent un éclairage sur la construction du personnage, mais semblent manquer d’un vrai fil conducteur. L’histoire d’amour avec Onassis, par exemple, est évoquée mais jamais pleinement développée, ce qui peut laisser sur sa faim. 

 

Il en va de même pour les moments de gloire sur scène, qui restent trop en retrait pour réellement illustrer l’impact de la cantatrice sur le monde de l’opéra. Ce que Maria réussit le mieux, c’est sans doute à faire ressentir l’isolement de son personnage. Maria Callas est montrée comme une femme coupée du monde, prisonnière d’un appartement luxueux mais vide, hantée par son passé et par une voix qui ne répond plus comme avant. Ce portrait mélancolique est renforcé par la mise en scène, qui enferme souvent Maria dans des cadres fixes, des espaces clos, des pièces plongées dans la pénombre. 

 

Cette sensation d’enfermement se retrouve dans le rythme du film, parfois au détriment de son impact émotionnel. Si cette approche fonctionne pour traduire la fin d’une vie marquée par le regret et l’abandon, elle risque aussi de perdre ceux qui espéraient un récit plus rythmé, plus engagé dans la reconstitution d’un destin hors du commun. Malgré sa beauté visuelle et l’investissement d’Angelina Jolie, Maria peut sembler distant. Là où Jackie et Spencer cherchaient à plonger dans la psyché de leurs héroïnes, ce film se contente d’observer, sans toujours permettre une réelle immersion.

 

Maria Callas est montrée avec ses contradictions : une femme à la fois puissante et vulnérable, élégante mais enfermée dans une certaine superficialité. Cette complexité est intéressante, mais elle crée aussi une forme de distance avec le spectateur. Difficile de réellement ressentir de l’empathie pour elle tant le film semble vouloir maintenir une barrière entre son personnage et nous. On respecte son parcours, on admire son talent, mais on ne parvient pas toujours à s’attacher à elle. Maria est un film qui choisit la contemplation plutôt que l’intensité dramatique. 

 

Il offre un dernier regard sur une femme qui a marqué son époque, mais il le fait avec une certaine retenue, qui empêche parfois l’émotion d’exploser pleinement. Si la performance d’Angelina Jolie et la photographie soignée apportent une vraie élégance au film, son rythme lent et son traitement parfois distant risquent de diviser. Ceux qui espéraient un portrait plus approfondi de la Callas en tant qu’artiste pourraient rester sur leur faim, tandis que ceux qui apprécient les films d’atmosphère trouveront dans Maria une expérience sensible et mélancolique. 

 

Note : 6.5/10. En bref, ce film est à l’image de son personnage : fascinant, mais insaisissable. Une belle manière de refermer cette trilogie, même si l’on aurait pu espérer un dernier acte plus vibrant.

Sorti le 5 février 2025 au cinéma

 

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