22 Mars 2025
L’Art d’être Heureux // De Stefan Liberski. Avec Benoît Poelvoorde, Camille Cottin et François Damiens.
Lorsqu’un film réunit un casting aussi prometteur que L’Art d’être Heureux, il est difficile de ne pas être tenté. Benoît Poelvoorde, François Damiens, Camille Cottin… Une distribution qui annonçait une comédie subtile, portée par des dialogues affûtés et une mise en scène inspirée. Pourtant, ce qui s’annonçait comme une exploration décalée du bonheur se transforme rapidement en une errance confuse, où l’humour peine à trouver sa place et où le récit se perd dans des détours interminables.
Jean-Yves Machond, peintre mondialement méconnu et globalement malheureux, décide un jour de changer de vie. Il va chercher l’inspiration dans une petite ville normande, afin de concevoir un chef-d’œuvre qui lui vaudra enfin gloire et reconnaissance éternelle. Mais sa rencontre avec les artistes locaux, du chaleureux Bagnoule à l’habile Cécile, va quelque peu le faire dévier de son chemin, et le mettre face à son rêve le plus profond : celui d’être un homme heureux, tout simplement.
Dès les premières minutes, une impression de flottement s’installe. Le film semble hésiter entre différents tons, oscillant entre burlesque et mélancolie sans jamais trouver le bon équilibre. L’histoire suit un artiste vieillissant, perdu dans ses ambitions et ses souvenirs, entouré de personnages hauts en couleur mais qui manquent cruellement de profondeur. L’idée de départ aurait pu être intéressante : explorer la quête du bonheur à travers des figures excentriques du monde de l’art. Mais très vite, le scénario tourne en rond. Les scènes s’enchaînent sans véritable progression, et l’absence de fil conducteur rend l’ensemble décousu.
Il devient difficile de s’attacher aux personnages ou de saisir leur véritable motivation. Malgré la présence d’acteurs talentueux, L’Art d’être Heureux ne parvient pas à leur donner des rôles à la hauteur de leur potentiel. Benoît Poelvoorde incarne un personnage désabusé, oscillant entre illuminé et looser attachant, mais l’écriture ne lui permet jamais de réellement briller. François Damiens, souvent impeccable dans le registre du décalé, semble ici en pilotage automatique. Quant à Camille Cottin, elle hérite d’un rôle peu exploité, qui aurait pourtant pu apporter un vrai contrepoint à l’ensemble.
L’un des principaux problèmes vient du fait que les personnages semblent être des caricatures d’eux-mêmes. Plutôt que de construire de véritables relations entre eux, le film les enferme dans une succession de dialogues pompeux ou de scènes absurdes, qui n’apportent rien à la narration. Il devient alors difficile de s’investir émotionnellement, tant ces figures restent en surface. L’humour, censé être un des points forts du film, s’avère souvent maladroit. Il repose essentiellement sur des dialogues alambiqués et des situations exagérées, sans jamais parvenir à créer une véritable dynamique comique.
Certains passages semblent vouloir jouer sur l’absurde, mais l’exécution manque de finesse. Là où un certain burlesque aurait pu fonctionner s’il était mieux maîtrisé, le film s’égare dans des gesticulations vaines. L’ensemble donne l’impression d’une succession de sketches étirés, sans rythme ni relief. Si L’Art d’être Heureux peut se targuer d’un atout, c’est bien son cadre visuel. Les prises de vue en extérieur, notamment celles qui mettent en avant la nature et les paysages marins, apportent un peu de respiration dans ce récit en apesanteur.
La mise en scène de Stefan Liberski, bien que correcte, ne parvient cependant pas à insuffler de la vie au film. Certains décors, comme cette DS bleue qui traverse le film en toile de fond, donnent parfois une impression de nostalgie bienvenue. Mais ces éléments ne suffisent pas à compenser le manque de substance du récit. Adapté du roman La Dilution de l’Artiste de Jean-Philippe Delhomme, le film semblait vouloir capturer un certain désenchantement du monde de l’art et de la création. Pourtant, ce qui aurait pu être une réflexion fine sur la désillusion artistique se transforme en une comédie erratique, où la bouffonnerie prend le pas sur toute profondeur.
Là où le livre jouait sur une critique subtile des milieux artistiques et de leurs contradictions, le film s’éparpille dans des dialogues longs et des situations qui paraissent forcées. Plutôt que d’inviter à la réflexion, il finit par lasser. L’absence de véritable enjeu se ressent jusque dans la dernière partie du film. Le dénouement, qui aurait pu apporter un regard neuf sur l’ensemble, se devine bien trop tôt. L’émotion, pourtant latente dans certaines scènes, n’arrive jamais à émerger pleinement. L’impression qui domine à la sortie du film est celle d’une expérience sans relief, qui laisse peu de traces.
Malgré un casting prometteur et une ambition affichée, L’Art d’être Heureux ne parvient jamais à trouver son ton. Son scénario décousu, ses personnages sous-exploités et son humour maladroit en font une œuvre qui peine à captiver. S’il reste quelques images agréables et une certaine sincérité dans l’interprétation de Benoît Poelvoorde, cela ne suffit pas à rattraper un ensemble qui manque cruellement de direction. Ce qui aurait pu être une exploration touchante du bonheur et de la désillusion artistique se transforme en une suite de scènes sans véritable fil conducteur. Un film qui, malheureusement, risque de sombrer rapidement dans l’oubli.
Note : 2/10. En bref, L’Art d’être Heureux ne parvient jamais à trouver son ton. Son scénario décousu, ses personnages sous-exploités et son humour maladroit en font une œuvre qui peine à captiver.
Sorti le 30 octobre 2024 au cinéma - Disponible en VOD
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