Critiques Séries : Yellowjackets. Saison 3. Episode 10 (season finale)

Yellowjackets // Saison 3. Episode 10. Full Circle.

SEASON FINALE

La saison 3 de Yellowjackets s’achève sur un épisode dense, parfois brutal, souvent dérangeant, mais surtout révélateur. Intitulé « Full Circle », ce final semble vouloir ramener l’histoire à son point de départ, tout en traçant, enfin, une voie vers une possible conclusion. Et il était temps. Ce dernier épisode se distingue d’abord par une sensation que beaucoup de fans attendaient : l’impression que les choses bougent. Après plusieurs épisodes à faire du surplace narratif, Yellowjackets semble se souvenir qu’une histoire a besoin d’un but, et que garder ses personnages dans une boucle de répétitions symboliques finit par fatiguer.

La tentative de contact de Natalie avec le monde extérieur — ce cri désespéré lancé dans le vide blanc et glacial — marque un tournant. Le fait que quelqu’un réponde semble presque irréel. Ce n’est pas seulement une scène forte en tension, c’est un signal clair : le sauvetage est peut-être proche. Et avec lui, un espoir de libération. Il aura fallu trois saisons pour découvrir l'identité de la fameuse Pit Girl. Il s’agissait donc de Mari. Une révélation attendue par beaucoup, mais qui, paradoxalement, manque de poids émotionnel à force d’avoir été trop repoussée. Même chose pour l’Antler Queen : c’est Shauna. 

On s’en doutait depuis un moment, et le fait de le confirmer maintenant laisse une sensation tiède. Pas parce que l’information est inintéressante, mais parce que la manière de l’amener ne suscite plus l’effet de surprise. Cela dit, maintenant que ces mystères sont levés, la série peut — et doit — avancer. La mécanique de teasing permanent a montré ses limites, et ce final semble vouloir s’en détacher. L’une des séquences les plus tendues de l’épisode oppose Lottie à Callie. Une confrontation aux allures de rituel sacrificiel, où la folie mystique rencontre une adolescence en quête de repères.

Lottie, dans son délire, voit en Callie une menace, voire une élue. Elle parle d’un “It” qui aurait habité Shauna, et qui vivrait maintenant en sa fille. Une métaphore lourde, que Lottie prend au pied de la lettre. Mais ce que la série semble surtout montrer ici, c’est le poids d’un traumatisme transmis de manière silencieuse, d’une mère à sa fille. Ce n’est pas un démon intérieur. C’est le poids de l’histoire, de l’absence d’explication, du silence autour de ce qui s’est passé dans la forêt. Et ce silence explose. Callie pousse Lottie dans les escaliers, dans un geste impulsif, tragique, mais presque logique. 

Lottie meurt, et une nouvelle couche de secret vient s’ajouter à l’histoire de ces femmes. Shauna termine l’épisode dans un isolement complet. Jeff et Callie ont disparu. Elle revient dans une maison vide, une existence vidée de sens. Et comme souvent chez elle, c’est la colère qui prend le dessus. Ce qui est intéressant ici, c’est que Shauna ne cherche pas à comprendre. Elle n’introspecte pas. Elle attaque. L’écriture de son journal, cette volonté de redevenir “la reine”, montre à quel point elle s’identifie encore à celle qu’elle était dans le passé. Non pas comme une victime, mais comme une survivante, une dominatrice, une figure de pouvoir.

On sent que la série prépare une guerre ouverte entre les survivantes, et que Shauna va sans doute jouer un rôle central dans cette nouvelle spirale de violence. Pendant que Shauna se replie sur elle-même, les autres membres du groupe commencent à tracer leurs propres chemins. Misty, toujours aussi méthodique dans ses manipulations, semble savourer sa position de détentrice de secrets. Elle sait. Et elle choisit, pour l’instant, de ne rien dire. Tai, de son côté, s’enfonce dans un deuil macabre. Manger le cœur de Van est un acte lourd de sens. Ce n’est pas de la barbarie gratuite. 

C’est un geste de fusion, d’appropriation, de continuité. Une manière de dire : “je vais porter ta mémoire en moi”. Étrange, dérangeant, mais cohérent avec ce que la série a toujours proposé. Quant à Natalie, sa fuite vers les montagnes et son appel réussi à l’extérieur représente l’un des rares instants d’optimisme du final. Ce n’est pas la fin du cauchemar, mais peut-être le début d’une échappée. Ce que réussit bien cet épisode, c’est de reconnecter les deux timelines — passé et présent — autour de thématiques partagées : la trahison, la survie, la perte de contrôle. 

L’effet miroir entre la chasse dans les bois et les tensions dans le monde adulte est bien mené, et annonce une possible “chasse moderne” à venir. Non plus pour se nourrir, mais pour se venger. Et c’est là que la série peut encore dire des choses intéressantes. La question n’est plus : “qu’est-ce qui s’est passé dans la forêt ?”, mais plutôt : “comment vit-on après ça ?”. On ne peut pas s’empêcher de penser que cette saison 3 a manqué de souffle à certains moments. L’intrigue s’est souvent perdue dans des symboles, des visions, des redites. Mais ce final remet certaines pendules à l’heure.

Il y a des pistes claires pour la suite. Le groupe pourrait être sauvé. Des tensions ouvertes dans le présent menacent d’éclater. Et surtout, la série semble enfin prête à affronter ce qu’elle avait évité jusqu’ici : la fin. Parce que si Yellowjackets veut rester une œuvre marquante, il faut savoir s’arrêter. Pas forcément en beauté. Mais avec justesse. Ce dernier épisode de la saison 3 n’est pas un chef-d’œuvre, mais il fait le travail. Il donne des réponses, ouvre des perspectives, recentre les enjeux. Et, surtout, il rappelle que la série ne peut pas vivre éternellement sur des flashbacks et des silences.

Note : 7/10. En bref, après un avant dernier épisode raté, la série termine la saison sur une jolie note malgré toutes les imperfections de ce dernier épisode. Il est temps pour Yellowjackets de clore son cercle. Et ce final nous donne envie de voir comment.

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Yellowjackets n’a pas encore été renouvelée pour une saison 4 par Showtime et Paramount+ à l’heure où j’écris ces lignes.