7 Octobre 2025
Back to Business // De Jonathan Eusebio. Avec Ke Huy Quan, Ariana DeBose et Daniel Wu.
Il arrive parfois qu’un film d’action rate sa cible non pas par manque d’énergie, mais par absence d’âme. Back to Business, premier long-métrage de Jonathan Eusebio, en est l’exemple parfait. L’ancien cascadeur passé derrière la caméra signe un film qui, malgré quelques éclairs de savoir-faire technique, s’essouffle dans un scénario paresseux et une écriture sans relief. Pourtant, sur le papier, l’idée avait de quoi intriguer : Ke Huy Quan, récemment remis sur le devant de la scène grâce à son rôle bouleversant dans Everything Everywhere All at Once, campe ici Marvin, un agent immobilier à la vie bien rangée… jusqu’au jour où son passé violent refait surface.
Un agent immobilier est ramené à la vie qu'il avait laissée derrière lui lorsque son ancien complice réapparaît avec un message inquiétant. Avec son frère, un baron du crime, également à ses trousses, il doit affronter son passé et l'histoire qu'il n'a jamais complètement enfouie.
De quoi mêler humour, romance et bastons chorégraphiées. En pratique, tout cela s’avère bien plus terne. Dès les premières minutes, Back to Business présente Marvin comme un homme ordinaire, un professionnel ambitieux rêvant d’obtenir le titre du meilleur agent immobilier de l’année. Mais derrière cette façade respectable se cache un ex-tueur à gages, contraint de replonger dans un monde qu’il croyait avoir laissé derrière lui. Le problème, c’est que ce virage narratif arrive sans réel contexte. Le passé du héros surgit sans explication, comme si le film supposait que le spectateur devine les morceaux manquants. Résultat : la tension ne prend pas.
Le personnage manque de profondeur, et les enjeux semblent artificiels. Ke Huy Quan s’en sort avec les honneurs, grâce à une sincérité et une énergie communicatives. Il dégage toujours ce mélange rare de gentillesse et de fragilité, mais il ne peut pas, à lui seul, sauver un scénario cousu de fil blanc. En tant que cascadeur, Jonathan Eusebio connaît les codes du cinéma d’action. Il a participé à la saga John Wick, et cela se sent : les scènes rapprochées, les combats à mains nues et certains cadrages serrés témoignent d’un vrai savoir-faire. Malheureusement, ces moments sont trop rares et souvent noyés dans un montage sans rythme. Les chorégraphies manquent de nerf et de fluidité, comme si le réalisateur, pourtant expert du mouvement, avait perdu confiance dans sa propre direction.
Certains affrontements semblent interminables, d’autres expédiés. Et lorsque les armes blanches ou les objets du quotidien deviennent des outils de combat, tout paraît exagéré, presque parodique. Visuellement, Back to Business oscille entre réalisme maladroit et numérique clinquant. Les effets spéciaux sont inégaux : certaines explosions manquent de crédibilité, et les dégâts physiques semblent aléatoires. Rien ne semble vraiment cohérent. Le film tente d’équilibrer action et romance, mais la mayonnaise ne prend pas. La relation entre Marvin et le personnage d’Ariana DeBose, censée apporter une touche émotionnelle, manque de naturel. L’alchimie ne fonctionne pas, et leur différence d’âge accentue une gêne que le film ne cherche jamais à résoudre.
Le scénario s’appuie sur des dialogues convenus, remplis de bons sentiments et de phrases toutes faites sur l’amour et la rédemption. On frôle parfois le mélodrame, comme si Back to Business hésitait entre la comédie romantique et le thriller d’action. Cette indécision lui coûte cher, car il finit par n’exceller dans aucun des deux registres. Le concept du héros au passé criminel qui tente de refaire sa vie n’est pas nouveau. Des films comme Nobody ou John Wick ont déjà exploré cette idée avec brio. Ici, Eusebio reprend la même recette, mais sans le liant. Les rebondissements arrivent sans préparation, et les motivations des personnages secondaires restent floues.
Le film évoque brièvement une rivalité entre Marvin et un concurrent immobilier, mais cette piste est vite abandonnée au profit d’une série de confrontations sans cohérence. Les flashbacks censés éclairer le passé du protagoniste sont trop courts pour créer un vrai mystère. L’ensemble donne une impression de bricolage narratif. Rien ne surprend, tout semble prévisible. Même les rares scènes censées révéler le “vrai” Marvin tombent à plat, faute de tension dramatique. Hormis Ke Huy Quan, le reste du casting peine à exister. Ariana DeBose, pourtant charismatique ailleurs, se contente ici d’un rôle accessoire réduit à une fonction romantique. Quant aux seconds rôles, ils semblent sortis d’un téléfilm d’action du dimanche : peu de nuances, beaucoup de stéréotypes.
La présence de Sean Astin, camarade de longue date de Quan depuis Les Goonies, aurait pu offrir un joli moment de nostalgie. Malheureusement, leurs retrouvailles ne produisent aucune étincelle. Le film ne prend même pas la peine d’en jouer. La direction d’acteurs, globalement, laisse à désirer. Le ton varie sans logique, les répliques tombent souvent à plat, et certaines scènes humoristiques provoquent plus de malaise que de rires. La bande originale de Back to Business n’aide pas à sauver les meubles. Entre morceaux pop mal placés et transitions sonores trop appuyées, la musique casse souvent le rythme au lieu de le renforcer. À vouloir jouer la carte du second degré, le film finit par perdre tout ton propre.
Au fond, Back to Business souffre d’un problème d’identité. Trop mou pour être un vrai film d’action, trop maladroit pour être une comédie, et trop superficiel pour émouvoir, il se perd dans ses ambitions contradictoires. Jonathan Eusebio a voulu prouver qu’il pouvait passer de la cascade à la réalisation, mais il semble avoir oublié l’essentiel : un bon film ne repose pas uniquement sur la technique. Il faut aussi une histoire solide, des personnages crédibles et un ton affirmé. Malgré quelques scènes bien exécutées et la présence attachante de Ke Huy Quan, le film ne décolle jamais. À peine 1h23 au compteur, et pourtant, il paraît durer le double.
Back to Business n’est ni un désastre total ni un plaisir coupable. C’est un film tiède, sans relief, qui laisse passer sa chance. L’idée de voir Ke Huy Quan dans un rôle d’action avait de quoi réjouir, mais le résultat manque cruellement d’énergie et d’émotion. À force de vouloir plaire à tout le monde, le film finit par n’émouvoir personne. Il y avait de la place pour un vrai renouveau du cinéma d’action à petit budget, mais Back to Business préfère recycler les recettes des autres sans y ajouter sa touche. Un film qui se regarde d’un œil distrait, se termine sans souvenir, et s’oublie dès le générique.
Note : 4/10. En bref, un film tiède, sans relief, qui laisse passer sa chance. L’idée de voir Ke Huy Quan dans un rôle d’action avait de quoi réjouir, mais le résultat manque cruellement d’énergie et d’émotion.
Sorti le 15 septembre 2025 directement en SVOD
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