Critique Ciné : Chien 51 (2025)

Critique Ciné : Chien 51 (2025)

Chien 51 // De Cédric Jimenez. Avec Gilles Lellouche, Adèle Exarchopoulos et Louis Garrel.

 

Annoncé comme une grande plongée dans la science-fiction à la française, Chien 51, de Cédric Jimenez, finit par ressembler à une longue publicité pour un Paris post-apocalyptique sponsorisé par la mairie et Netflix. Un projet ambitieux sur le papier, mais sur l’écran, c’est une autre histoire — une histoire d’ennui, de clichés et de potentiel gâché. Cédric Jimenez avait promis un Paris du futur, coupé en trois zones, gangrené par la technologie, la ségrégation et l’intelligence artificielle. En réalité, ce futur ressemble à un décor recyclé d’un vieux jeu vidéo des années 2000. On voit la Tour Eiffel, le Sacré-Cœur, deux-trois checkpoints vaguement crasseux, et hop, rideau. 

 

Dans un futur proche, Paris a été divisé en 3 zones qui séparent les classes sociales et où l’intelligence artificielle ALMA a révolutionné le travail de la police. Jusqu’à ce que son inventeur soit assassiné et que Salia et Zem, deux policiers que tout oppose, soient forcés à collaborer pour mener l’enquête.

 

Apparemment, c’est ça le Paris dystopique. Le reste, c’est du flou, du gris, et des drones tueurs sortis tout droit d’un catalogue d’effets spéciaux daté. Le film essaie d’aborder des thèmes lourds — le contrôle, la peur, la fracture sociale — mais tout reste à la surface. On devine qu’il y a des idées quelque part, mais elles sont noyées dans un montage sans rythme et un scénario qui semble avoir été réécrit à la pause café. Résultat : difficile de s’attacher à quoi que ce soit, sauf peut-être à l’idée de partir avant la fin. Gilles Lellouche, dans le rôle principal, fait ce qu’il peut. Il grogne, il transpire, il traîne sa lassitude de flic du futur avec un certain panache. 

 

Il aurait presque réussi à donner du relief à ce “Chien 51” si le film ne l’avait pas constamment ramené à des dialogues dignes d’un polar de seconde zone. À côté, Adèle Exarchopoulos semble perdue, affublée d’une frange improbable et d’un rôle qui ne la met jamais en valeur. Leur pseudo-histoire d’amour tombe à plat, aussi crédible qu’une déclaration romantique dans une salle d’interrogatoire. Louis Garrel tente d’apporter un peu de mystère en révolutionnaire de pacotille, mais son personnage flotte au-dessus du récit, comme s’il passait dire bonjour entre deux tournages. Quant à Romain Duris et Artus, leurs apparitions relèvent plus du sketch que de la construction dramatique. 

 

Il fallait oser : Chien 51 le fait, mais pas pour les bonnes raisons. Jimenez, habitué aux polars tendus (Bac Nord, Novembre), semble avoir voulu mélanger enquête policière, dystopie futuriste et romance tragique. Le problème, c’est qu’à force de tirer sur tous les fils, il finit par tout emmêler. Chien 51 veut ressembler à Blade Runner, mais sans sa profondeur, ni sa mélancolie. Il veut aussi garder la nervosité de ses précédents films, sauf qu’ici, l’action se limite à deux poursuites en bagnole et une scène de karaoké qui ferait passer un sketch de Patrick Sébastien pour du David Lynch. La mise en scène, elle, alterne entre le clinquant et le bricolé. 

 

Les effets spéciaux sentent la poussière numérique et la bande-son, censée dynamiser le tout, donne surtout envie de couper le son. On sent que le budget est passé quelque part — peut-être dans les néons — mais pas dans l’écriture. Dès les dix premières minutes, tout est plié : un meurtre, un flic, une IA menaçante, et un Paris qui tombe en ruine. Sauf que rien ne décolle vraiment. Les scènes s’enchaînent mécaniquement, sans tension, sans enjeu. Le spectateur attend un rebondissement, une révélation, n’importe quoi. Mais non. Le film déroule ses 2 heures comme une longue attente sans fin, où chaque scène promet plus qu’elle ne tient.

 

Le titre, Chien 51, n’est jamais expliqué. Peut-être une métaphore ? Peut-être juste une idée abandonnée en route. À ce stade, difficile de savoir. Le scénario se perd dans des dialogues pseudo-philosophiques sur la nature humaine et la technologie, pendant que l’intrigue principale s’effondre sous son propre poids. Et quand arrive la fin — sans intérêt, sans émotion — on se dit que même les personnages ont l’air soulagés que ce soit terminé. Cédric Jimenez semble avoir voulu prouver que le cinéma français pouvait rivaliser avec les blockbusters américains. Sur le principe, pourquoi pas. Sauf qu’à trop vouloir en mettre plein la vue, il oublie de raconter quelque chose. 

 

Le résultat, c’est un objet hybride, ni divertissant, ni profond. Un film coincé entre deux mondes : celui du thriller social et celui de la SF spectaculaire, sans jamais trouver son équilibre. Il y a pourtant quelques bonnes intentions : dénoncer la société de surveillance, la fracture entre riches et pauvres, les dérives de l’intelligence artificielle… Mais tout cela reste en surface, survolé, jamais incarné. Le film se contente d’illustrer des idées déjà mille fois vues, sans la moindre originalité visuelle ou émotionnelle. Chien 51 n’est pas seulement un ratage isolé, c’est aussi le symptôme d’un certain malaise du cinéma populaire français. Celui qui veut faire “à l’américaine” sans en avoir la cohérence, celui qui parle de futur sans comprendre le présent. 

 

Jimenez, cinéaste doué quand il reste ancré dans le réel, semble ici s’être perdu dans un terrain de jeu trop grand pour lui. Netflix a sans doute vu dans ce projet une vitrine internationale. Le résultat, c’est un produit formaté, qui pourra peut-être intriguer en Pologne ou en Argentine, mais qui laisse en France un goût amer : celui d’un cinéma qui a oublié d’être vivant. Chien 51 partait avec une idée prometteuse, un casting solide, et une envie de réinventer la SF française. Mais entre un scénario décousu, des personnages creux et une mise en scène paresseuse, le film finit par tourner à vide. C’est long, c’est confus, et surtout, c’est tristement prévisible.

 

Note : 2/10. En bref, entre un scénario décousu, des personnages creux et une mise en scène paresseuse, le film finit par tourner à vide. À défaut d’être une expérience de cinéma, c’est une leçon : même avec 40 millions d’euros et une équipe de stars, il faut plus qu’un décor de Paris futuriste pour faire rêver.

Sorti le 15 octobre 2025 au cinéma

 

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