24 Octobre 2025
Coyotes // De Colin Minihan. Avec Justin Long, Kate Bosworth et Mila Harris.
Colin Minihan revient avec Coyotes, un film mi-horrifique mi-satirique qui s’amuse à faire grincer la cohabitation entre nature sauvage et privilèges hollywoodiens. Un projet qui, sur le papier, avait tout pour plaire : un concept fort, un duo d’acteurs solides (Justin Long et Kate Bosworth), et un décor parfait pour une fable écologique moderne. Pourtant, le résultat tient davantage du film bancal que du thriller mordant qu’il voulait être. L’histoire se déroule dans les hauteurs des Hollywood Hills, territoire à la fois paradisiaque et fragile, où les incendies ne sont plus une menace mais une habitude saisonnière.
Une famille se retrouve poursuivie par une meute de coyotes fous au milieu d'un feu de forêt.
Scott, interprété par Justin Long, vit là avec sa femme Liv (Kate Bosworth) et leur fille Chloe. Une famille typique du cinéma américain : un père distrait, une mère pragmatique et une adolescente au bord de la crise de nerfs. Leur quotidien se dérègle le jour où un feu de forêt s’approche dangereusement de leur maison design, et avec lui, une meute de coyotes affamés descend des collines. Ce qui pourrait n’être qu’un simple survival animalier se transforme vite en satire des excès californiens : maisons vitrées plantées en pleine nature, insouciance face au désastre écologique, et cette illusion de sécurité qui s’effondre au premier coup de vent.
Minihan joue avec cette idée de la nature qui reprend ses droits, sauf qu’il peine à lui donner la cohérence ou la tension nécessaire. Dès la scène d’ouverture — une influenceuse et son chien victimes d’une attaque brutale — le ton hésite entre horreur et comédie noire. Ce mélange pourrait fonctionner, sauf que Coyotes ne semble jamais sûr de ce qu’il veut être. Les dialogues oscillent entre cynisme et sincérité, les gags visuels s’invitent au milieu des cris, et les morts violentes sont souvent montées comme des sketches gore. Il y a pourtant quelques réussites. L’exterminateur excentrique (Keir O’Donnell) apporte une dose de bizarrerie bienvenue, tout comme le voisin Trip, un fêtard pathétique campé par Norbert Leo Butz.
Ces personnages secondaires colorés donnent au film une allure de farce sur la décadence hollywoodienne. Mais à force de caricatures et de clins d’œil forcés, le scénario finit par ressembler à un collage de genres qui ne se parlent pas. L’humour fonctionne par moments, notamment grâce à la présence comique naturelle de Justin Long. Il incarne un père maladroit, plus habitué à dessiner des bandes dessinées qu’à se battre contre des bêtes sauvages. Ses tentatives de courage tournent souvent à la catastrophe, et c’est dans ces moments d’autodérision que le film trouve son souffle. Face à lui, Kate Bosworth joue la carte inverse : calme, lucide, presque trop sérieuse pour ce qui l’entoure.
Leur complicité de couple à la ville se ressent à l’écran, apportant un peu d’authenticité à un film qui en manque parfois cruellement. Impossible de parler de Coyotes sans évoquer l’éléphant – ou plutôt le canidé – dans la pièce : les effets visuels. Les créatures censées terroriser les personnages ressemblent à des simulations numériques sorties d’un générateur automatique. Trop propres, trop rigides, jamais vraiment ancrées dans le décor. Certaines séquences font même penser à un vieux jeu vidéo plus qu’à un film de studio sorti en 2025. Ce problème technique mine complètement la tension. Difficile d’avoir peur quand les prédateurs paraissent flotter dans l’image.
Pire encore, leur comportement incohérent — parfois rusé, parfois idiot — retire toute crédibilité au danger. La rumeur d’une utilisation d’IA pour concevoir ces animaux numériques n’a jamais été confirmée, mais le simple fait qu’elle existe en dit long sur la qualité du rendu. Derrière cette maladresse visuelle se cache pourtant une bonne idée : celle d’une invasion animale comme métaphore d’un écosystème à bout de souffle. Les coyotes ne sont pas juste des monstres ; ils sont les victimes collatérales des incendies, chassés de leur habitat par la négligence humaine. Le film évoque cette dimension écologique à demi-mot, sans jamais oser la creuser.
Comme si Minihan craignait de trop s’éloigner du pur divertissement. Au-delà des crocs et du sang, Coyotes raconte surtout la désagrégation d’une famille moderne, coupée du réel. Scott, le père, symbolise l’homme déconnecté, enfermé dans son imaginaire d’artiste et incapable de gérer une crise. Liv, sa femme, prend les choses en main, reléguant son mari au rôle de spectateur paniqué. Cette inversion des rôles traditionnels donne lieu à quelques scènes intéressantes, où le film questionne sans insister la fragilité des masculinités modernes. Leur fille Chloe, incarnée par Mila Harris, apporte l’émotion la plus sincère du film.
Ses réactions face au danger, souvent plus authentiques que celles de ses parents, permettent d’ancrer le récit dans une forme de réalisme. Dommage que le scénario choisisse parfois la facilité, multipliant les clichés du survival : portes barricadées, flammes en fond, et cris dans la nuit. Pourtant, malgré ses maladresses, Coyotes offre quelques fulgurances visuelles. Minihan sait filmer les espaces confinés et transforme la villa vitrée du couple en cage dorée. À travers ses plans, le film évoque un monde où la modernité a effacé toute barrière entre nature et artifice, jusqu’à ce que le sauvage vienne frapper à la porte.
Avec ses 92 minutes, Coyotes ne perd pas de temps. L’action démarre vite et ne ralentit presque jamais. Ce rythme soutenu évite l’ennui, mais il empêche aussi toute réelle montée de tension. Chaque scène de panique est suivie d’une blague ou d’un gag visuel, comme si le film refusait d’assumer pleinement son horreur. Ce choix en fait un divertissement nerveux, plus proche d’une série B assumée que d’un vrai thriller animalier. Certains apprécieront ce ton décomplexé, d’autres regretteront l’absence de frisson. Tout dépend de ce que l’on cherche : un spectacle sanglant et absurde, ou un film d’angoisse crédible.
Coyotes est une créature hybride : à moitié satire, à moitié film d’horreur, souvent maladroite mais rarement ennuyeuse. Son ton décalé, son humour noir et son duo d’acteurs sauvent un scénario trop inégal pour pleinement convaincre. Malgré des effets spéciaux ratés et un propos écologique sous-exploité, il y a quelque chose d’attachant dans cette tentative de transformer la peur en spectacle comique. Pas le film le plus mordant de l’année, mais certainement l’un des plus curieux.
Note : 5.5/10. En bref, Coyotes reste un bon moment pour les amateurs de films d’horreur légers et ironiques, ceux qui aiment voir Justin Long courir en chemise de nuit contre des bêtes numériques sans trop se poser de questions. Mais pour qui espérait une fable mordante sur la décadence californienne ou une vraie réflexion écologique, le film risque de laisser sur sa faim.
Prochainement en France
Retrouvez sur mon blog des critiques de cinéma et de séries télé du monde entier tous les jours
Voir le profil de delromainzika sur le portail Overblog