Critique Ciné : Le Dernier des Juifs (2024)

Critique Ciné : Le Dernier des Juifs (2024)

Le Dernier des Juifs // De Noé Debré. Avec Michael Zindel, Agnès Jaoui et Solal Bouloudnine.

 

Avant de nous montrer son Zorro pour France 2 avec Jean Dujardin dans le rôle titre, Noé Debré (Parlement) signe ici son premier long métrage. Le cinéma français a souvent été le miroir des réalités sociales et culturelles de notre société. Le Dernier des Juifs, en est un parfait exemple. Cette comédie teintée de mélancolie aborde avec finesse et humour le départ des juifs des quartiers populaires et véhicule un message de réconciliation entre les communautés, en évitant les écueils du communautarisme. À 27 ans, Bellisha vit toujours avec sa mère Giselle dans une cité de la banlieue parisienne. Giselle, recluse dans son appartement, se nourrit des récits embellis de son fils. Bellisha, prétendu champion de krav maga et talentueux commercial, peint un tableau idyllique du monde extérieur pour protéger sa mère des dures réalités.

 

Bellisha a 27 ans et mène une vie de petit retraité, il va au café, fait le marché, flâne dans la cité... Il vit chez sa mère Giselle, qui sort très peu et à qui il fait croire qu'il est solidement intégré dans la vie active. Le vent tourne quand Giselle s'aperçoit qu'ils sont les derniers juifs de leur cité. Elle se convainc qu'il faut qu'ils partent eux-aussi. Bellisha n'en a pas très envie mais pour rassurer sa mère, il lui fait croire qu'il prépare leur départ.

 

Cette relation mère-fils, pleine de tendresse et de mensonges protecteurs, est au cœur du film. Giselle rêve de quitter son quartier pour rejoindre Saint-Mandé et sa communauté juive, tandis que Bellisha est attaché à ses habitudes et ses amis, malgré un environnement de plus en plus hostile. Noé Debré, fort de son expérience de scénariste, dépeint la vie dans une banlieue populaire sans sombrer dans les clichés. Le film questionne subtilement l’antisémitisme des quartiers populaires, l’angoisse et la méfiance qui s’immiscent insidieusement dans les relations de voisinage. Giselle, observant du balcon les allers et venues des habitants, s'interroge : « Qu’est-ce qu’il y a comme Noirs ! Mais où sont passés les Arabes ? ». Cette phrase, à la fois drôle et poignante, illustre la complexité des relations intercommunautaires.

 

L’une des forces de Le Dernier des Juifs réside dans sa capacité à traiter des sujets graves avec légèreté. Debré réussit à éviter les pièges du prêchi-prêcha et de la moralisation. Le film déboulonne les clichés sur le racisme et l’antisémitisme sans tomber dans l’angélisme. Il n’y a pas de bons ou de méchants désignés, pas de victimes ou de bourreaux clairement identifiables. Tout est dans la nuance, la délicatesse et l’autodérision. Bellisha, interprété par un jeune acteur plein de charme, est un personnage lunaire et décalé, rappelant un Jean-Pierre Léaud moderne ou un Pierre Richard des cités. Son décalage avec la réalité, ses mensonges protecteurs et son attachement à son quartier font de lui un personnage touchant et authentique. Giselle, interprétée avec brio, représente la peur et le désir de protection face à un monde extérieur perçu comme hostile.

 

Michel Zindel et Agnès Jaoui, en état de grâce, apportent une profondeur et une humanité supplémentaires au film. Leur jeu subtil et émouvant soutient parfaitement le récit de Debré. Ensemble, ils réalisent un véritable miracle d’humour et de délicatesse. Le Dernier des Juifs est une œuvre remarquable par sa justesse et sa sincérité. Noé Debré signe un film sans prétention qui aborde des sujets graves avec légèreté et subtilité. Cette comédie mélancolique nous fait rire, réfléchir et émeut sans jamais tomber dans la caricature ou la moralisation. Elle offre une vision nuancée et humaniste des relations intercommunautaires, prouvant que l’humour peut être une arme puissante contre les préjugés et les divisions. Un film à voir absolument, qui nous rappelle que la réconciliation est possible, même dans les contextes les plus difficiles.

 

Note : 7.5/10. En bref, une comédie mélancolique qui rassemble les communautés. 

Sorti le 24 janvier 2024 au cinéma - Disponible en VOD

 

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