10 Avril 2025
Minecraft, le film // De Jared Hess. Avec Jack Black, Jason Momoa et Danielle Brooks.
L’idée de porter Minecraft au cinéma avait de quoi intriguer. Après tout, adapter l’un des jeux vidéo les plus populaires de ces deux dernières décennies, avec son esthétique cubique, ses mécanismes de création infinie et son univers libre, offrait un terrain fertile pour une œuvre inventive, voire originale. Pourtant, une fois les lumières rallumées, difficile de ne pas ressentir un certain malaise. Pas forcément un rejet viscéral, mais un mélange de frustration et d’incompréhension face à ce qui a été proposé. Visuellement, le film emprunte sans surprise les codes graphiques du jeu : des blocs, des créatures familières, des paysages aux textures volontairement pixelisées. Sur ce point, l’effort est là.
Bienvenue dans l’univers de Minecraft où la créativité est essentielle à la survie ! Quatre outsiders – Garrett, Henry, Natalie et Dawn – sont soudainement projetés à travers un mystérieux portail menant à La Surface – un incroyable monde cubique qui prospère grâce à l’imagination. Pour rentrer chez eux, il leur faudra maîtriser ce monde (et le protéger de créatures maléfiques comme les Piglins et les Zombies), tout en s’engageant dans une quête fantastique aux côtés de Steve, expert fabricateur. Cette aventure les poussera à être audacieux et à développer leur créativité. Autant de facultés dont ils auront besoin pour s’épanouir dans le monde réel.
Certains décors fonctionnent même plutôt bien, recréant un monde immédiatement reconnaissable pour les joueurs. Mais là où l’animation aurait pu sublimer l’univers, elle crée au contraire un malaise. Le rendu donne par moments une impression étrange, presque dérangeante. Les mouvements sont saccadés, les articulations manquent de naturel, et certains personnages ressemblent plus à des avatars de mauvaise qualité qu’à de véritables héros de cinéma. Ce n’est pas la fidélité à l’esprit "cubique" qui dérange, mais la manière dont elle est exploitée. L’univers du jeu est riche de possibilités, il invite à la construction, à l’expérimentation, à la liberté totale.
Le film, lui, semble s’enfermer dans une esthétique rigide, sans chercher à dépasser cette contrainte pour proposer quelque chose de fort visuellement. L’histoire aurait pu rattraper le reste. Malheureusement, elle se contente du strict minimum. Une menace surgit, un héros se lève, des compagnons se joignent à lui, et le groupe part à l’aventure pour sauver le monde. Tout est cousu de fil blanc, avec une succession de péripéties sans véritable tension. Le plus problématique reste sans doute l’absence d’une véritable direction narrative. Le film semble hésiter constamment entre plusieurs genres : parfois aventure, parfois comédie, parfois parodie… mais sans jamais vraiment s’assumer dans l’un ou l’autre.
Certains moments qui devraient porter de l’émotion tombent à plat, car les enjeux ne sont jamais assez clairs ni suffisamment forts. Les relations entre les personnages, censées créer de l’attachement, manquent elles aussi de profondeur. On sent des tentatives de bâtir des liens, de glisser des conflits internes ou des moments de complicité, mais cela sonne souvent creux. Peut-être à cause d’une écriture trop basique ou de dialogues qui peinent à sonner juste. Steve, figure emblématique de Minecraft, est placé au centre de l’intrigue. Son interprétation, surtout en version française, reste plutôt réussie, et il finit par susciter une certaine sympathie.
C’est d’ailleurs l’un des rares personnages à avoir un semblant de consistance. Autour de lui gravitent plusieurs autres figures, mais beaucoup donnent l’impression d’être là pour remplir une case plutôt que pour faire avancer l’histoire. Le casting vocal semblait pourtant prometteur. Des comédiens talentueux comme Jason Momoa ou Jack Black auraient pu apporter une vraie énergie. Sauf que leur présence ne suffit pas à masquer le manque d’implication visible, surtout dans un film qui repose énormément sur le ton et la dynamique entre personnages. Le duo Steve-Garrett fonctionne par moment, mais cela reste bien maigre face à un ensemble aussi dispersé.
La mise en scène, censée donner du rythme et de la vie à l’ensemble, souffre d’un manque d’homogénéité. Certains plans sont brouillons, les enchaînements manquent de fluidité, et certains cadrages frôlent l’absurde. Le film semble parfois vouloir en mettre plein la vue, puis retombe aussitôt dans une léthargie narrative. Et que dire des scènes dans le monde réel ? Elles auraient pu offrir un contrepoint intéressant à l’univers pixelisé, mais leur exécution manque de justesse. Elles paraissent trop exagérées, presque caricaturales, et ne s’intègrent pas harmonieusement au reste.
Ces séquences coupent le rythme, ajoutent peu à l’histoire, et donnent une impression d’inutilité totale. L’un des plus grands ratés du film reste peut-être son incapacité à saisir ce qui fait la force de Minecraft : la créativité. Le jeu est un bac à sable géant, où chacun peut construire, détruire, explorer, imaginer son propre monde. Le film, lui, semble figé dans un schéma narratif ultra balisé, sans surprise, sans véritable inventivité. Certes, le film cherche à rester accessible à un jeune public, mais cela ne justifie pas un scénario aussi vide de sens et de profondeur.
Le potentiel était là pour raconter une histoire universelle, pleine de poésie, d’aventure et de réflexion sur l’imaginaire. Au lieu de ça, on assiste à une série de séquences convenues, ponctuées de gags pas toujours inspirés, et de rebondissements prévisibles. Tout n’est pas complètement raté. Certaines scènes d’action tiennent la route, quelques décors surprennent agréablement, et l’ambiance sonore réussit parfois à poser une atmosphère immersive. Le film n’ennuie pas totalement, il se regarde sans trop de douleur, mais il ne laisse rien derrière lui. Pas d’émotion durable, pas de réflexion, pas même une envie de replonger dans le jeu une fois sorti de la salle.
C’est peut-être ça, le plus regrettable : l’impression que Minecraft, qui est pourtant une ode à l’imaginaire et à la liberté, devient ici un simple produit de consommation rapide, conçu pour capitaliser sur une marque connue sans jamais chercher à raconter quelque chose de sincère ou d’ambitieux. Minecraft, le film, ressemble à une occasion manquée. Une adaptation qui, malgré un univers riche et prometteur, ne parvient ni à captiver ni à émerveiller. Trop formaté, trop plat, trop hésitant, il semble chercher à plaire sans jamais vraiment trouver sa voie. Peut-être que certains jeunes spectateurs y trouveront un divertissement correct, mais difficile d’y voir une œuvre marquante.
Pour les fans du jeu, comme pour les amateurs de cinéma d’animation, la frustration risque de prendre le dessus. Un film qui aurait dû construire quelque chose… mais qui, au final, reste bloqué à la première couche.
Note : 2/10. En bref, une adaptation qui, malgré un univers riche et prometteur, ne parvient ni à captiver ni à émerveiller. Trop formaté, trop plat, trop hésitant, il semble chercher à plaire sans jamais vraiment trouver sa voie.
Sorti le 2 avril 2025 au cinéma
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