21 Janvier 2025
La première saison de Subteran marque une étape notable : c'est la première série originale roumaine diffusée sur Netflix. Ce choix d'exportation peut sembler surprenant pour certains, mais il illustre bien l’ouverture croissante de la plateforme à des récits diversifiés et enracinés dans des contextes culturels variés. Avec ses six épisodes d’environ 40 minutes chacun, cette série s’inscrit dans le genre du thriller criminel, un territoire déjà bien balisé, mais qu’elle explore avec une identité propre. Sans réinventer les codes du genre, elle parvient à captiver grâce à son rythme maîtrisé et à quelques touches d’humour inattendues.
La vie d'une jeune mère est complètement chamboulée quand elle doit cacher sa véritable identité pour échapper au gang de Bucarest qui a tué son fiancé.
L’intrigue de Subteran démarre sur des bases familières : un enquêteur, Luca, s’efforce de démanteler un réseau criminel dirigé par Nicolae Tănase, un caïd redoutable. Aidé par un informateur surnommé Bones, Luca met en place un plan visant à s’emparer d’un ordinateur contenant des données compromettantes : des informations sur les finances et les complicités de Tănase avec des fonctionnaires corrompus. Ce postulat pourrait paraître classique, mais dès le premier épisode, la série prend un virage brusque. Ce qui semble être une mission policière bien huilée tourne rapidement au chaos, bouleversant les vies de plusieurs personnages.
Le cœur narratif de la série repose sur deux figures principales : Cami, une experte en informatique, et Bones, un homme oscillant entre ses intérêts personnels et sa collaboration avec la police. La mort soudaine de Luca, abattu dans une scène où il apparaît en visioconférence avec Cami, sert de déclencheur dramatique. Désormais seule pour protéger son fils et éclaircir les mystères entourant cette tragédie, Cami est poussée à infiltrer l’organisation criminelle de Tănase. Le dilemme moral qui en découle, ainsi que l’évolution de ses rapports avec Bones, constitue le fil rouge émotionnel de la série.
L’un des aspects remarquables de Subteran réside dans la manière dont elle construit ses personnages féminins. Cami, par exemple, s’éloigne des stéréotypes habituels de la "demoiselle en détresse". Son rôle de mère célibataire n’est pas qu’un détail narratif ; il influence ses choix, renforce sa détermination et justifie ses décisions parfois risquées. Même lorsqu’elle semble dépassée par les événements, elle reste active dans sa quête de vérité et de survie. Sa transformation physique, où elle passe d’un look sobre à une apparence plus audacieuse, illustre son immersion progressive dans le monde criminel. Cela pourrait sembler peu crédible, mais le contexte tend à rendre cette évolution acceptable.
En parallèle, les jumelles Crisi et Tili, filles de Tănase, apportent une dynamique intéressante à la série. Le fait que l’une d’elles soit tuée dès le premier épisode peut surprendre, mais cette décision narrative souligne l’instabilité et la violence du milieu dans lequel elles évoluent. Tili, en particulier, s’impose comme une antagoniste mémorable, bien qu’elle flirte parfois avec la caricature. Ses actions et sa relation avec son partenaire Dracu contribuent à maintenir une tension constante dans l’intrigue.
L’un des points forts de Subteran est son rythme. La série ne s’encombre pas de sous-intrigues inutiles ou de temps morts. Chaque épisode contient une dose d’action, que ce soit sous forme de poursuites, de confrontations physiques ou de moments de suspense. Cela permet de maintenir l’attention du spectateur et de compenser certaines faiblesses, comme des personnages secondaires un peu sous-développés. Par exemple, Bones, bien qu’il joue un rôle central, aurait pu bénéficier d’une exploration plus approfondie de son passé et de ses motivations.
En revanche, la série perd un peu de sa vivacité dans sa seconde moitié. Si les premiers épisodes séduisent par leur mélange d’action et de moments plus légers, le ton devient plus sérieux au fur et à mesure que l’intrigue progresse. Cela n’est pas forcément un défaut, mais l’humour subtil qui caractérisait le début de la série tend à s’effacer, ce qui laisse une impression de déséquilibre. Visuellement, Subteran est à la hauteur des standards internationaux. Les décors urbains et les lieux sombres utilisés pour les scènes clés renforcent l’atmosphère pesante et nerveuse du récit. La série tire également parti de sa localisation en Roumanie, en intégrant des éléments culturels qui lui confèrent une certaine authenticité.
Cela se reflète aussi dans la bande originale, qui mêle des sonorités modernes à des influences locales. La musique, d’ailleurs, joue un rôle clé dans la création d’une ambiance dynamique et contribue à rendre certaines scènes mémorables. Les scènes d’action sont bien chorégraphiées sans tomber dans l’excès. Il n’y a pas de séquences spectaculaires à grand budget, mais ce choix semble délibéré : Subteran privilégie une approche réaliste qui correspond à l’histoire qu’elle raconte. Les costumes et les détails visuels ajoutent une touche de sophistication, sans pour autant éclipser l’intrigue principale. Le dernier épisode de la saison laisse certaines questions en suspens, suggérant la possibilité d’une suite.
Cependant, la conclusion parvient à être suffisamment satisfaisante pour ne pas frustrer les spectateurs. Ce genre de fin ambiguë peut diviser, mais dans le cas de Subteran, elle fonctionne bien. Elle reflète l’idée que dans ce type d’univers, les solutions simples et définitives sont rares. De plus, cette ouverture laisse entrevoir un potentiel narratif pour une éventuelle saison 2, où les personnages pourraient être davantage développés. Même si Subteran possède de nombreuses qualités, elle n’est pas exempte de défauts. Certains éléments de l’intrigue, comme l’utilisation de clichés ou des raccourcis narratifs, peuvent sembler un peu faciles.
Par exemple, le fait que Cami et Bones s’infiltrent dans le réseau criminel de Tănase ne crée pas autant de tension que l’on pourrait l’espérer. Le manque de conséquences immédiates ou de changements significatifs pour les personnages limite l’impact émotionnel de cette partie de l’histoire. De plus, certains spectateurs pourraient trouver que l’intrigue est parfois prévisible. Les rebondissements, bien que divertissants, ne surprendront pas nécessairement les amateurs aguerris de thrillers criminels. Cela dit, ces critiques n’altèrent pas fondamentalement l’expérience globale. La série réussit à rester engageante grâce à son rythme rapide et à ses personnages principaux attachants.
Subteran ne cherche pas à révolutionner le genre du thriller criminel, et c’est peut-être là sa force. Elle s’assume comme une série divertissante, accessible et bien construite. Si l’on considère qu’il s’agit d’un premier essai roumain pour Netflix, c’est une réussite honorable. La série parvient à équilibrer ses influences internationales avec une identité locale distincte, offrant ainsi une expérience rafraîchissante pour les spectateurs en quête de nouveauté. Pour ceux qui apprécient les histoires de crime, de suspense et d’infiltration, Subteran est une recommandation facile. Elle ne demande pas un investissement énorme en termes de temps, mais offre un divertissement de qualité qui ne donne jamais l’impression de perdre son temps.
La série ouvre également une porte intéressante vers la culture télévisuelle roumaine, souvent méconnue, et donne envie de voir ce que ce pays pourrait proposer à l’avenir. En somme, Subteran n’est pas une série qui bouleversera les codes, mais elle remplit sa mission : captiver, intriguer et divertir. Avec une saison 2 potentielle en ligne de mire, il sera intéressant de voir si elle parvient à approfondir ses personnages et à pousser son récit encore plus loin. En attendant, cette première saison constitue une belle introduction à un univers sombre et captivant, où rien ni personne n’est vraiment ce qu’il semble être.
Note : 5.5/10. En bref, une série qui, sans briller, ne démérite pas.
Disponible sur Netflix
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