Critique Ciné : K.O (2025, Netflix)

Critique Ciné :  K.O (2025, Netflix)

K.O // De Antoine Blossier. Avec Ciryl Gane, Alice Belaïdi et Faued Nabba.

 

Dans le paysage encore timide du film de genre français, K.O. débarque sur Netflix avec la promesse d’un polar musclé aux accents urbains, porté par la figure imposante de Ciryl Gane, champion de MMA. Réalisé par Antoine Blossier, connu pour À toute épreuve et Rémi sans famille, le long-métrage tente un virage vers une tonalité plus sombre, plus brutale. Mais entre ses ambitions de série B assumée et les limites de son écriture, K.O. finit par ressembler à un uppercut qui manque sa cible. Le film suit Bastien, ancien combattant de MMA reclus, rongé par la culpabilité d’une bavure qui a mis fin à sa carrière. 

 

Bastien vit reclus depuis qu'il a tué accidentellement son adversaire Enzo, 3 ans plus tôt, durant un combat de MMA. La veuve d'Enzo le retrouve et vient lui demander de l’aide. Bastien est son seul espoir de secourir Léo, son fils adolescent qui a disparu dans les quartiers Nord de Marseille. Bastien part alors à sa recherche. Sur son chemin, il croise Kenza, jeune flic prête à tout pour faire tomber les nouveaux barons de la cité phocéenne. Léo est en grand danger, il faut faire vite.

 

Une mission de la dernière chance lui est proposée : infiltrer un réseau mafieux dans un Marseille crépusculaire, gangrené par les règlements de compte. Ce pitch, déjà entendu mille fois, pose les bases d’un récit de rédemption cousu de fil blanc. Ce qui aurait pu devenir une plongée tendue dans les bas-fonds d’une ville en tension se contente souvent d'effleurer son sujet. L’ambiance visuelle, volontairement brute, évoque un Marseille rugueux, presque hors du temps, mais l'écriture ne suit pas. L’intrigue s’étire sur une mécanique assez prévisible, où chaque rebondissement semble calqué sur un cahier des charges. En tête d’affiche, Ciryl Gane livre une prestation très physique, évidemment crédible dans les scènes de combat. 

 

Son gabarit impose immédiatement, et son passé de sportif joue en sa faveur pour donner du réalisme à ses échanges violents. Là où le bât blesse, c’est dans les scènes plus intimistes ou émotionnelles. Son jeu reste encore rigide, surtout quand il s’agit de porter une émotion autre que la colère ou la détermination. À ses côtés, Alice Belaïdi incarne Kenza, une flic sans attache, elle aussi cabossée par le passé. Son interprétation oscille entre le surjeu et une sincérité par moments perceptible. Si elle dégage une certaine intensité dans le dernier acte, sa crédibilité dans le rôle de la flic de terrain ne convainc pas entièrement. Il manque quelque chose dans la posture, dans l’ancrage, pour que son personnage tienne la route face à l’environnement brutal qu’il traverse. 

 

Le film mise ouvertement sur ses scènes de baston pour compenser la légèreté de son scénario. Sur ce point, K.O. ne déçoit pas complètement. Les chorégraphies de combat sont bien exécutées, nettes et lisibles, loin des montages hachés souvent reprochés à ce genre de productions. Une scène dans une boîte de nuit et un épilogue nerveux marquent les seuls vrais pics d’intensité du récit. Mais le reste du film tourne autour de ces moments avec une certaine mollesse. La montée dramatique est trop linéaire, et le scénario ne parvient jamais à créer une tension durable. Tout est là pour une série B efficace, mais la mayonnaise ne prend pas complètement. Il manque cette touche de folie ou d’audace qui aurait permis de faire oublier le classicisme de l’ensemble.

 

Antoine Blossier livre un travail formel honnête. L’éclairage est soigné, les plans sont propres, et le montage respecte un bon rythme. Rien de honteux, mais rien de vraiment marquant non plus. K.O. donne le sentiment d’un film fonctionnel, comme pensé pour occuper un créneau bien précis sur la plateforme : celui du film d’action du samedi soir, à consommer sans trop réfléchir. On pense parfois au cinéma Europacorp des années 2000 ou encore à Balle perdue, ou même à Assaut sur le central 13, sans que le film parvienne à digérer ces références pour en tirer une identité propre. Le tout reste dans les clous, jamais audacieux, jamais dérangeant. L’un des points les plus faibles du film reste son écriture. Les dialogues manquent cruellement de naturel. 

 

Ils sonnent creux, mécaniques, sans vie. Certains échanges frôlent le cliché, et cela nuit à l’immersion. Les personnages secondaires, malgré un casting solide sur le papier (Kofs entre autres), peinent à dépasser leurs archétypes. Le voyou tourmenté, la flic borderline, le méchant caricatural… Tout cela fonctionne à moitié. Difficile aussi de ressentir une réelle empathie pour les personnages tant ils restent esquissés. Leur passé est effleuré, leur psychologie réduite à des punchlines ou des flashbacks expédiés. Le film donne la sensation de vouloir aller à l’essentiel, mais dans cette économie d’écriture, il perd toute épaisseur. KO n’est pas un naufrage. Il assume son statut de film d’action modeste, sans grandes prétentions.

 

C’est peut-être son principal mérite. Le film existe, et dans le paysage français, où le polar urbain est encore trop peu exploré, cette existence a une forme de valeur. Il y a une envie de faire un cinéma plus frontal, plus musclé, mais le résultat reste trop timoré pour convaincre pleinement. Il y a pourtant des pistes à creuser : la dimension de rédemption du personnage principal, le cadre marseillais avec sa rugosité, ou encore la confrontation entre violence sociale et violence physique. Mais K.O. préfère survoler, enchaîner les scènes, et boucler son récit sans prendre de risque. KO, disponible sur Netflix, reste une tentative intéressante mais inaboutie de film d’action à la française. 

 

Ciryl Gane fait ses premiers pas dans le cinéma avec application, mais son jeu reste encore limité. La mise en scène, correcte mais sans éclat, peine à porter un scénario trop classique et des dialogues mal ciselés. Pour les amateurs de films de baston, quelques scènes bien menées valent le coup d’œil. Mais le film manque cruellement d’âme et de singularité pour laisser une vraie empreinte. À regarder comme un divertissement ponctuel, sans en attendre plus qu’une poignée de scènes musclées dans un écrin un peu trop sage.

 

Note : 5/10. En bref, K.O. préfère survoler, enchaîner les scènes, et boucler son récit sans prendre de risque. KO reste une tentative intéressante mais inaboutie de film d’action à la française. 

Sorti le 6 juin 2025 directement sur Netflix

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