Critiques Séries : Elsbeth. Saison 3. Episode 3.

Critiques Séries : Elsbeth. Saison 3. Episode 3.

Elsbeth // Saison 3. Episode 3. Good Grief.

 

Après un deuxième épisode qui explorait les zones d’ombre du deuil et de la dépendance affective, Elsbeth revient cette semaine avec un troisième épisode au ton faussement léger, centré sur une idée universelle : celle de la seconde chance. Mais comme souvent dans la série, ce qui semble offrir un nouveau départ devient rapidement le révélateur d’une illusion soigneusement entretenue. L’épisode s’ouvre sur Raquel Drabowski, interprétée par Julia Fox, veuve d’un pompier disparu dix-huit mois plus tôt lors d’un crash d’hélicoptère. 

 

Loin de se laisser submerger par le désespoir, Raquel a su transformer sa douleur en opportunité : elle est devenue une « grief influencer », une figure médiatique incarnant la résilience. Sa participation à l’émission Black Veil, qui aide d’autres veuves à « retrouver l’amour », lui a offert notoriété, contrats et millions d’abonnés. Ce portrait d’une femme qui capitalise sur la perte évoque la manière dont Elsbeth interroge, depuis ses débuts, les dérives de la performance émotionnelle dans la société moderne. On y retrouve le regard à la fois amusé et inquiet que la série pose sur la frontière floue entre authenticité et mise en scène, thème déjà esquissé dans l’épisode “Ramen Holiday” de la saison précédente.

Mais ce petit empire du chagrin s’effondre brutalement lorsque Johnny, le mari présumé mort, réapparaît. L’événement, qui pourrait relever du miracle, devient pour Raquel une catastrophe : si Johnny est vivant, tout son récit public — et donc son gagne-pain — s’effondre. Johnny, revenu d’entre les morts, raconte une histoire bancale : éjecté du crash, recueilli par des habitants de la jungle, frappé d’amnésie avant de recouvrer la mémoire en voyant Raquel à la télévision. Rien ne tient debout, mais Raquel ne s’y attarde pas. Ce n’est pas tant la vérité qui l’intéresse que la menace que ce retour fait peser sur sa marque personnelle.

 

Très vite, elle imagine une issue radicale : profiter du court laps de temps où personne ne sait que Johnny est revenu, pour le faire disparaître à nouveau. La scène du ferry, avant de pousser son mec par-dessus bord, condense à elle seule la logique implacable du personnage — celle d’une femme qui choisit de tuer pour sauver sa narration plutôt que d’affronter la perte de contrôle. Ce qui frappe dans cet épisode, c’est la manière dont Elsbeth continue de détourner les codes du polar pour mieux sonder le monde contemporain. Le meurtre, ici, n’est pas seulement une question de mobile ou de preuve : il devient le symptôme d’une époque où tout doit pouvoir se monétiser, même la douleur.

Elsbeth, fidèle à son instinct plus qu’à la procédure, avance dans l’enquête avec cette curiosité bienveillante qui la caractérise. Comme dans l’épisode précédent, où elle observait la mécanique fragile de la culpabilité parentale, elle cherche moins à juger qu’à comprendre. Son échange avec la mère de Johnny, Marie, donne d’ailleurs lieu à l’un des moments les plus justes du récit. Là où Raquel instrumentalise la mort, Marie la vit encore — simplement, sans caméra ni filtre. C’est à travers ce contraste que la série touche juste : Elsbeth n’oppose pas le vrai au faux, mais le vécu sincère à la représentation permanente. L’autre fil narratif, plus discret mais essentiel, concerne le retour de Kaya Blanke. 

 

Après sa promotion à la fin de la saison 2, on la retrouve ici sous couverture, infiltrée dans une enquête sur la corruption portuaire. Son apparition, brève mais significative, apporte une respiration émotionnelle bienvenue. La rencontre secrète entre Kaya et Elsbeth au bar fonctionne comme un rappel de la complicité qui unissait les deux femmes. Depuis le départ d’Angus, Elsbeth semble dériver un peu, et Kaya, même de manière fugace, réintroduit ce lien humain qui lui manque. Comme souvent dans la série, la relation entre les personnages féminins dépasse le simple cadre professionnel : c’est un miroir de leur solitude, mais aussi de leur solidarité. L’épisode laisse planer un doute inquiétant : le téléphone de Kaya est coupé, et son infiltration paraît de plus en plus risquée. 

Ce fil narratif promet de devenir l’arc majeur de la saison, à la manière de la conspiration judiciaire qui traversait la saison 2. L’intrigue de Raquel, avec ses airs de satire des réseaux sociaux, aurait pu tomber dans la caricature. Mais la mise en scène choisit au contraire la retenue. On rit parfois du cynisme du personnage, mais sans jamais le tourner en ridicule. On perçoit aussi la peur viscérale de perdre tout ce qu’elle a bâti, même si cette construction repose sur un mensonge.  Quand Elsbeth révèle, avec l’aide de l’application LiveClock, que les prétendus directs de Raquel étaient enregistrés à l’avance, la série clôt sa démonstration avec finesse : ce n’est pas seulement le crime qui est dévoilé, mais l’artifice d’une époque entière. 

 

La confrontation finale, tournée comme une scène de télé-réalité, boucle la boucle : Raquel, qui voulait tout contrôler, finit piégée par sa propre scénographie. Ce troisième épisode confirme que Elsbeth a trouvé un ton propre dans cette saison 3 : plus mélancolique, plus réflexif, tout en restant fidèle à l’humour doux et à la curiosité du personnage principal. Après la parenthèse intime de l’épisode 2, celui-ci élargit le propos vers des enjeux sociaux : la culture de l’image, la marchandisation de soi, la difficulté de rester sincère dans un monde qui valorise le spectacle.

 

L’épisode se conclut sur une note d’incertitude : Kaya est peut-être en danger, Elsbeth peine à trouver sa place dans une équipe où elle n’a plus ses repères, et l’affaire du port semble annoncer une intrigue plus vaste. Comme souvent dans la série, la légèreté apparente masque un questionnement profond : comment continuer à croire au lien humain quand tout pousse à la mise en scène ?

 

Note : 8/10. En bref, ce troisième épisode confirme que Elsbeth a trouvé un ton propre dans cette saison 3 : plus mélancolique, plus réflexif, tout en restant fidèle à l’humour doux et à la curiosité du personnage principal. 

Prochainement sur TF1 et TF1+

 

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